Double-cœur, Alexandre Jardin (Grasset) : et si on vous donnait la clef de l’amour éternel ?

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Double-cœur, Alexandre Jardin

Editions Grasset, novembre 2018

Et si quelqu’un avait découvert la clef de l’amour inusable, l’avait diffusée auprès d’initiés ? Cela donnerait une confrérie d’adeptes de la passion perpétuelle : les double-cœurs. Mais peut-être existent-ils vraiment ces voleurs d’étincelles ?…

Alexandre Bulle, écrivain, doit livrer à son éditeur germanopratin prénommé Dizzy, un roman pessimiste sur l’amour. Pour Dizzy en effet, tout sentiment amoureux est voué à ployer, décroitre et déchoir. Voilà qui contrarie fortement Alexandre Bulle, qui à l’aube de la trentaine, « aime la foudre, les gifles du désir et les Niagara de douceur », autrement dit un auteur adepte de la passion vive, qui ne conçoit pas l’amour comme tiède. L’inverse de Dizzy.

Pourtant, la relation d’Alexandre avec Eglantine semblerait donner raison à Dizzy. Après une cour assidue de neuf mois, une montée du désir à son paroxysme et trois années de vie de couple, toute folie amoureuse a disparu. Lui qui aspirait à se brûler à la flamme de la passion éternelle, se gèle en contemplant les cendres de sa vie de couple. C’est alors qu’il tombe sur le petit ouvrage de Madeleine Lévy, publié en 1947. Dans ce livret intitulé Les double-cœurs, cette femme animée d’une rage heureuse, d’une soif éperdue de vie, propose à tout un chacun d’aimer autrement. Pour Alexandre, c’est une révélation. Et de découvrir que la théorie de Madeleine a fait de nombreux adeptes, lesquels forment une confrérie secrète appelée les double-cœurs, peuple de l’amour fou. Ils s’opposent au pessimisme fataliste des « petits-cœurs », qui entretiennent la funeste conviction que toute passion est vouée à mourir, que l’intimité érode inéluctablement le désir. Les principes des double-cœurs ? On note parmi eux, que l’amour n’est pas un sentiment mais un festin de folies, que le cœur est fait pour vieillir sans craquelures, qu’aimer intelligemment c’est frustrer avec talent, qu’aimer c’est méditer ensemble, ou encore que vivre c’est aimer, c’est exiger un chef-d’œuvre sinon rien. Alexandre décide alors de se rapprocher de cette confrérie pour tenter de trouver celle avec laquelle amour rimera avec passion toujours.

Dans la sinistrose ambiante, voilà un livre optimiste, passionné et plein de folie, qui propose une autre façon de s’aimer et déclare la guerre à la routine, à la fatalité, à la tiédeur. Avec fougue, Alexandre Jardin invite le lecteur à remettre en cause l’usure du désir dans le couple, imagine des parades pour entretenir la flamme de la passion éternellement. Et tente de contaminer le lecteur avec son énergie folle, sa soif de merveilleux, sa faim d’absolu. Sa douce folie.