©Karine Fléjo photographie
Le simple titre est de toute beauté. Un premier roman extrêmement touchant, envoûtant, sur deux solitudes qui se rencontrent et s’apprivoisent. Parce qu’il vient toujours un moment où il devient possible d’égarer sa tristesse et de ne plus s’égarer en elle.
Se reconstruire après une épreuve
Elise, la trentaine, vit repliée sur elle-même depuis le décès de son mari alors qu’elle attendait leur premier enfant. Victime d’un anévrisme, la disparition de ce dernier a fait voler en éclat leur bonheur, leurs projets. Elise se retrouve avec un bébé à élever seule, contrainte à tenir debout pour ce petit être qui fait ses premiers pas dans la vie. Tenir debout est une chose, mais sourire, espérer, vivre et non survivre, est au-dessus de ses forces. Croiser des gens qui sourient tandis qu’elle n’est que géhenne lui est cruel.
Témoin de son naufrage, une vieille dame prénommée Manou, voisine d’Elise, l’exhorte à réagir, à ne plus perdre un jour de plus : « Je t’ai laissé un an pour pleurer. Maintenant, je te demande de vivre. »
Et de lui faire une proposition inattendue : elle lui remet le trousseau de clés de sa maison de Pornic et lui propose d’aller y séjourner le temps qu’il faudra avec son enfant, pour se ressourcer. Pour délocaliser sa tristesse. Elise finit par accepter, plus pour fuir sa mère envahissante que par réelle envie d’aller au bord de la mer.
Alors qu’elle commence à mieux dormir, à souffler un peu dans ces lieux où rien ne lui rappelle son défunt mari, Clément, le petit-fils de Manou, débarque dans la maison de Pornic pour y faire des réparations. Un jeune homme dont le sourire permanent agresse Elise, lui renvoyant sans cesse ce dont elle n’est plus capable : être heureuse.
Mais derrière ce sourire, Clément est-il si heureux qu’il l’affiche ? Pourquoi Manou a-t-elle prêté sa maison à Elise alors qu’elle savait que Clément allait y séjourner aussi ? Ses intentions étaient-elles si innocentes que cela ? Deux êtres blessés et méfiants peuvent-ils s’apprivoiser ?
Un roman sensible, délicat et positif
La plume de Marion McGuinness est sensible, juste dans l’analyse de la psychologie des personnages et des situations. Au fil des pages, elle sait créer une intimité entre ses personnages et le lecteur, personnages principaux comme secondaires, de sorte que le lecteur suit leurs difficultés, leurs espoirs, leurs tentatives avec émotion et empathie. Deux êtres malmenés par la vie sont-ils plus à même de se comprendre et de s’entendre ? Ou au contraire, leur sensibilité à fleur de peau rend-elle toute approche et tout apprivoisement impossibles ? N’ayez pas peur du sujet : ce roman est tout sauf sombre. C’est au contraire un roman positif, aux personnages très attachants, qui continuent à hanter l’esprit une fois la lecture terminée.