
Un roman d’amour et de libertinage, ainsi qu’un bel hommage à Aragon.
Une femme d’un magnétisme imparable
Quand Blanche de N. apparaît, veuve riche et lettrée, tous les regards convergent vers elle. Chacun retient sa respiration. Fasciné. Hypnotisé. Et ce soir-là à Capri, le narrateur ne fait pas exception. Quinquagénaire, nomade sentimental, il a jusqu’alors toujours tenu l‘amour à distance. Le plaisir oui. L’engagement non. Pourtant, Blanche va bouleverser tous ses repères, le faire sortir de sa zone de confort, bousculer ses préjugés sur l’amour.
Car Blanche a ce don de percevoir les failles de l’Autre avec une acuité extraordinaire, d’en jouer en virtuose, de s’en saisir pour asseoir sa force. La solitude profonde et intérieure du narrateur ne lui échappe pas. Une proie idéale sur laquelle elle va se jeter sans attendre. Avant de la jeter.
« Ces êtres sont redoutables car ils vont nous gouverner avant même d’avoir pris la peine de le vouloir. Leurs mots, leurs gestes, leurs pensées, leurs actes vont pincer notre sensibilité avec un doigté si habile, que nous les regarderons, malgré les douleurs qu’ils nous infligent, et bien qu’ils nous aient rendus étrangers à nous-mêmes, comme les meilleurs interprètes de ce que nous sommes en secret. »
Jusqu’où peut-on aller par amour, ou plus exactement, par besoin d’être aimé? Qu’est-on prêt à accepter pour entretenir l’illusion d’être compris?
Amours toxiques
L’amour, thème fétiche de la plume de Jean-Paul Enthoven, est vu ici sous son angle toxique. Dans Ce qui plaisait à Blanche, paru aux éditions Grasset, l’auteur se penche sur ces amours qui conduisent l’Autre à vivre sur des montagnes russes, passant de l’euphorie au désespoir, acceptant l’inacceptable par peur de perdre l’être aimé. Quitte à se perdre soi-même, à négliger ses besoins, à ignorer ses envies. A devenir un autre. Un étranger.
Un roman à l’écriture merveilleuse, ciselée, qui m’a cependant semblé long par moment. On cerne assez vite Blanche, son pouvoir de destruction, et quand on découvre ce qui lui plait, la tension narrative retombe un peu… Un sentiment mitigé donc.
Une relation sulfureuse, libertine, tumultueuse et un hommage au chantre de l’amour qu’était Aragon.
Informations pratiques
Ce qui plaisait à Blanche, Jean-Paul Enthoven – Editions Grasset, 2020 – 320 pages- 22€