Voyage au bout de l’enfance, Rachid Benzine

voyage au bout de l'enfance

Quand un petit garçon plein de vie de la banlieue parisienne voit sa vie basculer dans l’horreur parce que ses parents ont décidé de rejoindre la Syrie et de faire le Djihad. Un livre poignant. Un personnage inoubliable.

Du rêve au cauchemar

Fabien mène une existence heureuse avec ses copains dans la banlieue nord de Paris. Elève de CE2, il a été remarqué par son instituteur non seulement pour l’excellence de ses résultats mais aussi pour son talent en rédaction de poésies. Son imaginaire, sa créativité forcent l’admiration. Mais sa vie va prendre une tournure dramatique. Son père lui annonce brusquement leur départ en voyage. Destination : la Syrie. Le but : rejoindre l’état islamique.

Fabien ne partage pas l’excitation de ses parents. Et les premiers jours à Raqqah lui donnent raison. On le rebaptise Farid, on l’inscrit dans une école coranique puis à l’école des lionceaux du califat. Son père part faire la guerre.

Heureusement, dans ce chaos, il y a Abdel, un jeune garçon qui excelle au foot et avec lequel il devient ami. Et puis, il a le merveilleux pouvoir de l’écriture, ces poèmes qui le sauvent, lui permettent de s’évader par l’esprit. Le reste du temps n’est que désolation.

Et quand ses parents réalisent leur aveuglement, l’enfer sur terre qu’ils ont pris pour le paradis, il est trop tard pour faire machine arrière.

Pourront-ils revenir en France ? Pourront-ils rendre à leur fils sa part d’enfance ? Pourront-ils avoir la vie sauve ?

Faire le Djihad

C’est un roman d’une densité rare, d’une puissance évocatrice inouïe, que nous offre Rachid Benzine avec Voyage au bout de l’enfance, aux éditions du Seuil. Il y a quelques semaines, je vous avais parlé du livre de témoignages de Dunya Mikhail, Un apiculteur au secours des Yézidies, sur les femmes persécutées par Daech. Ici, Rachid Benzine nous offre un autre point de vue. Il nous plonge dans la tête d’un enfant de 8/9 ans, un petit garçon qui à cet âge devrait nager en pleine insouciance, jouer au foot avec ses copains, rire, écrire ses poésies pleines de couleurs. Et non ce petit garçon qui se retrouve catapulté du jour au lendemain en Syrie, au cœur de la barbarie, l’innocence envolée et l’enfance piétinée.

Avec une grande justesse de ton, une infinie sensibilité, on suit le parcours de ce courageux petit garçon pour survivre au quotidien dans l’enfer des exécutions, des camps, de la violence. Un petit bonhomme pour lequel ce voyage en Syrie n’est ni plus ni moins qu’un voyage au bout de l’enfance. Pour ne pas dire au bout de la vie. Un roman qui interroge sur notre attitude vis à vis de ces enfants innocents, victimes de la décision de leurs parents de faire le djihad et victimes de notre rejet ensuite. Une invitation à la tolérance et à la prise de conscience de leur sort.

Un roman poignant, d’une grande humanité .

Parce qu’il y a des enfances qui n’en sont pas et des enfants que l’on fait grandir trop vite

Parce que le bruit et la fureur engloutissent leurs rêves, leur poésie et leurs mots,

Parce qu’aujourd’hui, se demander si les enfants de criminels méritent notre pardon est une insulte à la raison,

Parce que nous devons avoir le courage d’affronter l’horreur dans leurs yeux et l’humanité de les accueillir pour les soigner,

Parce que ces enfants sont ceux de ce monde que nous avons laissé sombrer,

Et parce qu’il n’est jamais trop tard

Informations pratiques

Voyage au bout de l’enfance, Rachid Benzine – Editions d Seuil, janvier 2022 – 80 pages – 13 €

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