Rentrée littéraire : La filature, Arnaud Sagnard

la filature Arnaud Sagnard

C’est un roman qui glace le sang. Ou quand l’humain n’est plus qu’un pion pour l’entreprise, pion que l’on manipule sans état d’âme et sacrifie sur l’autel de la rentabilité.

Refonte complète d’entreprise et coût humain

Los Angeles, 2017. Daniel Stein travaille comme conducteur de bus depuis des années dans la même compagnie, la Los Angeles County Metropolitan Transportation Authority. Employé modèle et expérimenté, il a le privilège de rouler sur la ligne la plus agréable, la ligne 2. Aussi, quand il est convoqué au bureau du DRH, il ne s’attend absolument pas au séisme qu’on lui réserve. L’entreprise entame en effet une refonte complète de son organisation et demande à Daniel Stein de passer dans l’équipe des hiboux, chauffeurs ainsi surnommés car ils travaillent de nuit.  Une rétrogradation humiliante. Car travailler de nuit, c’est côtoyer les passagers ivres, agressifs, paumés, être le témoin de bagarres. Cette décision entrera en vigueur la semaine suivante.

Un homme dans l’ombre observe la réaction du chauffeur, c’est Jonathan Harris, senior Partner pour une compagnie d’assurances. Daniel Stein va-t-il capituler, se soumettre à la décision du DRH, ou va-t-il embarquer ses collègues et les syndicats dans un mouvement de rébellion ? Cet homme est un cobaye à son insu, l’élément clé d’un stress test : si Daniel Stein, le meilleur élément de la compagnie, accepte les nouvelles conditions, alors les autres chauffeurs le suivront. S’il s’y oppose, alors les risques pour la compagnie d’assurances sont élevés et assurer la compagnie de bus n’est pas souhaitable.

En filant le conducteur, Jonathan Harris ne s’attend cependant pas à ce qu’il va découvrir à son sujet…

Se libérer de l’enfance

En cette rentrée littéraire, Arnaud Sagnard publie son deuxième roman aux éditions Stock : La filature. Un thème très actuel, celui des restructurations d’entreprise. Quand on parle de restructuration d’entreprise, on met le plus souvent l’accent sur les licenciements que cela engendre et donc sur le personnel licencié. Mais les coûts sociaux qui portent sur les salariés qui demeurent dans l’entreprise reconfigurée sont peu abordés. C’est cet angle que choisit l’auteur, qui se focalise sur un des meilleurs éléments de l’entreprise pour mesurer comment il encaisse le choc. Les pratiques managériales glacent le sang. Cet homme n’est qu’un pion, un élément témoin que l’on suit pour savoir si la mesure va bien passer avec le reste des employés ou non. Un fusible en quelque sorte. Peu importe qu’il saute, peu importe l’impact sur sa vie personnelle, on est dans une expérience déshumanisée. Mais cette fois, Daniel Stein ne va pas être mis KO. Cette humiliation de plus, de trop, va peut-être lui donner le ressort de réagir, de se libérer du fardeau qu’il traine depuis l’enfance.

Si le sujet est très intéressant, le style très lyrique et les nombreuses digressions cassent le rythme et diluent la tension narrative. La proximité nouée avec le personnage en souffre aussi. Le fond m’a séduite, la forme moins. Un sentiment mitigé donc.

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