
Un roman tout en finesse, qui explore avec brio les liens familiaux, notamment les rivalités intestines au sein d’une fratrie, de même que la liberté de créer quand on est artiste. Peut-on tout dire dans ses livres, dans ses chansons, dans ses films et doit-on être fidèle à la réalité ?
Fratrie et rivalités
Antoine et Claire se retrouvent dans la maison familiale, pour soutenir leur mère et assister aux obsèques de leur père. Manque un membre de la fratrie à l’appel, le fils cadet, dont ils ignorent s’il viendra : Paul. Paul, c’est un peu l’élément perturbateur de la famille. Si l’ainée, Claire, a toujours été l’enfant sage, la fille qui s’est employée à toujours donner satisfaction à ses parents, à rester dans le chemin tracé par le père, si Antoine le benjamin, a toujours fait montre d’une sensibilité plus grande, du besoin d’être protégé, s’il est senti écrasé par son frère si brillant et sa sœur si sage, Paul s’est distingué. Il a fait carrière dans le cinéma et s’est attiré les foudres de son père comme celles d’Antoine en dénigrant sa famille dans ses œuvres, en remodelant la vérité, en s’inventant une enfance, en reniant ses origines. Du moins est-ce ainsi qu’ils l’ont perçu.
Aussi, quand finalement il rejoint la maison familiale, Antoine lui montre les crocs. Mord. Et de lui reprocher son absence de limites, la violence, l’impunité et l’insensibilité dont sa totale liberté de créateur est révélatrice. Pour Paul, ces accusations sont injustifiées, le fruit d’une obsession à vouloir absolument se reconnaitre dans ses personnages. Sauront-ils faire la paix ? Qui dit vrai ? Ont-ils tous raison à leur façon ?
La liberté de créer
En cette rentrée littéraire aux éditions Flammarion, avec Dessous les roses Olivier Adam soulève avec finesse et justesse plusieurs interrogations : est-ce parce qu’on a eu les mêmes parents qu’on a reçu la même éducation ? Vécu la même enfance ? Quand on a eu une enfance commune, en conserve-t-on forcément les mêmes souvenirs, les mêmes impressions de joie ou de peine ? Certains conservent des roses le velours des pétales. D’autres les épines. Selon la place occupée dans la fratrie se nouent des relations particulières entre parents et enfant, mais aussi entre les frères et sœurs. Peut-on dès lors prétendre avoir eu la même enfance sous prétexte qu’on a eu les mêmes parents et la même maison ? Dans un trio, c’est souvent le schéma de l’aîné protecteur et responsable, le petit dernier chouchou et le cadet qui doit se démarquer.
Mais pas seulement. Olivier Adam nous interroge aussi sur la liberté de créer quand on est artiste. Un artiste, qu’il soit chanteur, cinéaste, peintre ou encore écrivain, a-t-il le droit de faire de sa vie privée et de celle de sa famille élargie une matière première pour ses créations ? Un artiste a-t-il le droit d’écrire sur ses proches sans leur consentement, voire de tordre la réalité ? Autrement dit : la création doit-elle être fidèle à la vérité, à la réalité, ou est-elle totalement libre, y compris d’évoquer la vie des autres sans leur accord préalable ? Peut-il y avoir création sans totale liberté ?
Touche par touche, chacun donne son ressenti dans ce roman choral, met à jour les rivalités intestines entre les frères, la place de modératrice de la sœur, confronte son point de vue. Jusqu’à la chute finale qui révèle une mise en abime vertigineuse …
Informations pratiques
Dessous les roses, Olivier Adam- Rentrée littéraire – Editions Flammarion, août 2022 – 21€ – 248 pages