Là où vont les belles choses, Michelle Sacks

Là où vont les belles choses

Après La vie dont nous rêvions, la fascinante et talentueuse Michelle Sacks nous revient avec un roman noir au suspens implacable, rédigé à hauteur d’enfant. Emouvant. Fascinant. Brillant.

Partir à l’aventure

Quand son père l’a fait monter en voiture avec sa confidente Clemesta- un cheval en peluche en apparence, mais doté de parole en réalité 😉  – Dolly s’est réjouie. Ne lui annonçait-il pas que tous les deux partaient à l’aventure ? Où ? Mystère, son père tenait à garder la destination finale secrète, sinon la surprise n’en fût plus une. Ce père qui d’habitude a peu de temps à lui consacrer, rentre du travail d’humeur maussade, se proposait cette fois de passer 24 heures/24 avec elle. Le paradis.

Et la première étape le soir dans un luxueux hôtel a en effet tout d’une aventure paradisiaque. Bain moussant à gogo repas de sucreries, tout ce que sa maman lui interdit d’ordinaire est ici possible. Une maman après laquelle Dolly est en colère. Elle fréquente en cachette un étrange monsieur, surnommé « tu-sais-qui », lequel lui met de drôles d’idées dans la tête. Une maman qui évolue sur des montagnes russes, alterne entre parties de rigolade avec Dolly et jours entiers passés au lit à pleurer. Partie en week-end avec des amies, Dolly se retrouve seule avec son père et s’en félicite.

Mais peu à peu, des souvenirs émergent que Dolly s’empresse de refouler dans un recoin de sa tête appelé « Pas maintenant ». Des notes dissonantes qui écorchent cette mélodie du bonheur. De quelle aventure s’agit-il vraiment ? Ne serait-ce pas davantage une fuite, un acte désespéré ? Et sa maman, la reverra-t-elle un jour ?

Un roman noir admirable

J’ai découvert Michelle Sacks avec son premier roman, le fascinant La vie dont nous rêvions (Chronique ICI). Un cocktails de domination, d’adultère et de perversion, pour un roman aussi glaçant qu’addictif. Il me tardait donc de découvrir son deuxième roman, Là où vont les belles choses, paru ce mois de mai aux éditions Belfond, et force m’est de reconnaitre que la romancière confirme ici son incroyable talent.

Cette fois, elle se glisse dans la tête d’une enfant de 8 ans. Avec beaucoup de candeur, de spontanéité, de malice aussi, elle nous décrit cette aventure à laquelle la petite fille participe avec son père. Le ton est indiciblement juste, les réparties pleines d’humour et d’émotion. Avec sensibilité, Michelle Sacks nous fait entrevoir le monde à hauteur de l’enfant, avec son regard, son imaginaire, sa capacité d’interprétation, ses questionnements, ses doutes, ses espoirs et ses colères aussi. Impossible de ne pas fondre d’amour pour la petite Dolly, de ne pas adopter son cheval alezan aux pouvoirs magiques. Comment un enfant réagit face au traumatisme ? Comment l’imaginaire l’aide-t-il à surmonter les épreuves ? Comment atteint-il la résilience ?

Au fil des pages, la romancière fait monter la tension, plonge le lecteur dans une atmosphère inquiétante. Ce qui s’annonçait être une belle aventure se révèle être tout autre. Les défaillances du père et de la mère apparaissent. La vérité se glisse dans les failles des apparences, grossit, enfle, jusqu’à la chute finale, aussi vertigineuse que bouleversante.

Un roman virtuose. Une romancière à suivre absolument !

Informations pratiques

Là où vont les belles choses, Michelle Sacks- éditions Belfond, mai 2021 – 272 pages – 21 €