Vers le soleil, Julien Sandrel

Vers le soleil

Envie d’un séjour en Toscane? De douceur? De tendresse? D’amour? D’inattendu? Julien Sandrel vous offre tout cela et bien davantage au cœur de ses pages (et en plus ça rime! 😉 ) . Un pur bonheur de lecture!

Le rôle de sa vie

Sacha est acteur et rêve de voir son nom briller sur les affiches de cinéma. Mais pour l’heure, il ne décroche que des rôles de figurant. Alors, pour subsister dans sa chambre de bonne à Paris, il cumule des petits boulots improbables.

Enfant, il a appris combien s’attacher aux êtres pouvait faire souffrir et rendre vulnérable. Alors depuis, il se protège et évite toute relation affective. Pourtant, quand il croise Tess à la terrasse d’un café, une attirance irrépressible le pousse vers elle. Et alors qu’ils engagent la conversation, elle lui propose un job encore plus improbable que tous ceux qu’il a exercés jusqu’ici : jouer un des rôles principaux dans le film de la vie de sa fille. Mère célibataire, Tess élève seule sa petite fille Sienna, âgée de 6 ans. Or l’enfant traverse une passe difficile. Elle a besoin à ses côtés d’une présence masculine, paternaliste, à laquelle se raccrocher. Un rôle de pure composition, sans scénario écrit à l’avance. De la totale improvisation, quelques après-midis par mois, le tout rémunéré 500€.

Une rémunération régulière, la perspective de croiser Tess, voilà deux arguments à même de convaincre Sacha d’accepter. Mais le scénario va lui réserver des rebondissements que personne, pas même Tess, n’avait anticipés…

Un roman qui fait du bien

Si vous avez lu les précédents romans de Julien Sandrel, alors je ne vous apprendrai rien en vous disant que son univers est d’une infinie douceur et d’une extrême bienveillance. Vers le soleil est dans cette même merveilleuse veine et porte en son titre toute la lumière de ses pages. Vous embarquez avec Tess, Sienna et Sacha en Toscane, caressés par les rayons du soleil italien, touchés par la profondeur et l’humanité des personnages, happés par l’intrigue. Quel est le secret de Tess? Que ou qui fuit-elle? Sacha sera t-il à la hauteur de son rôle?

Avec beaucoup de finesse, de justesse, sans jamais verser dans le pathos, Julien Sandrel nous montre combien la vie dépasse parfois la fiction. que les plus beaux rôles ne sont pas au cinéma mais ceux que la vie nous offre et que l’on incarne pleinement, sans jouer ni avec les sentiments ni avec les êtres. Mais surtout, il nous prouve que rien n’est jamais définitivement écrit, arrêté, terminé. Il est toujours possible de rebondir plus fort, plus haut, plus loin. De dépasser son passé.

Un roman dont chaque page est un rayon de soleil, qui vous réchauffe le cœur et l’âme!

Informations pratiques

Vers le soleil, Julien Sandrel – éditions Calmann Lévy, février 2021 – 268 pages – 18,50€

Du même auteur

Retrouvez les chroniques que j’ai consacrées aux précédents romans de Julien Sandrel en cliquant sur leur titre ! 🙂

Les étincelles

La vie qui m’attendait

La chambre des merveilles

Livre jeunesse : Le tricot, Jacques Goldstyn

Le tricot
Copyright photo Karine Fléjo

Quand on déroule le fil de la vie tel le fil d’une pelote de laine et que se tricote entre une grand-mère et sa petite-fille la plus belle des complicités.

Une grand-mère tricoteuse

D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Madeleine a toujours vu sa grand-mère tricoter. Entre ses doigts de fée, la laine se transforme en foulards incroyables, chandails, bas, gants ou encore tuques. Des vêtements qui font le bonheur de ses proches et leur assure confort et chaleur.

Un jour où la grand-mère de Madeleine lui confie comment est née chez elle cette passion du tricot, elle lui sort de son coffre mystérieux son tout premier foulard à vie. Imaginez donc : un foulard réalisé avec toutes les pelotes de laine usagée qu’elle récupérait, et ce, pendant des années. Mieux : grand-mère Léa décide de lui offrir ce joyau.

Toute heureuse, Madeleine file avec son butin à l’école. Mais ce qu’elle n’a pas vu, c’est qu’un brin de laine est resté coincé dans la porte de la maison….

Un livre sur la transmission entre générations

C’est un livre particulièrement tendre que nous offre Jacques Goldstyn avec Le tricot. L’histoire met en avant la relation grand-parent/petit-enfant qui se tricote au fil du temps, la transmission des savoirs, des expériences. La grand-mère égrène ses souvenirs d’enfance, chaque circonstance qui a vu naître un nouveau tricot. Et surtout, elle encourage sa petite fille à ne jamais se décourager, à écouter les conseils des autres, ceux qui ont l’expérience. Elle lui transmet ainsi en douceur ses valeurs.

Une tendresse infinie émane de même des superbes illustrations à l’aquarelle et à l’encre de Chine. Des dessins vivants, joyeux à la croisée des styles de Sempé et de Peynet.

J’ai vraiment passé un joli moment entre ces pages. Comme une parenthsèe enchantée, une invitation à prendre le temps. de mire et de tricoter.

Informations pratiques

Le tricot, Jacques Goldstyn – éditions La pastèque, janvier 2021 – 15€ – 88 pages illustrées-

Le silence d’Isra, Etaf Rum

Le silence d'Is
Copyright photo Karine Fléjo

Un roman impossible à lâcher, sur la condition des femmes victimes de mariages arrangés. Et un vibrant hommage au pouvoir des livres. A lire absolument!

Mariage arrangé et condition de la femme

1990, Palestine, territoires occupés. Agée de 17 ans, Isra passe ses journées aux côtés de sa mère pour l’assister dans les tâches ménagères. Tel est le sort réservé aux femmes. Son seul luxe, vécu dans la clandestinité : lire, s’évader dans les contes des mille et nuits, dans les écrits de Rumi ou de Khalil Gibran. Par la lecture, Isra nourrit son imaginaire, ses rêves d’amour, de liberté. Car dans la réalité, hélas, son avenir semble tout tracé : ses parents lui cherchent un prétendant. Et pas question de se soustraire à une décision du père. Suivre les traditions à la lettre sous peine d’être ostracisée. Accepter un mariage arrangé alors qu’elle rêve d’aimer et d’être aimée en retour. Se conformer aux conventions en silence. Se soumettre. Telle est la condition de la femme dans sa communauté.

Quand on lui annonce qu’elle va devoir épouser Adam, un palestinien qui a émigré à Brooklyn, on lui fait croire que son sort est enviable. Vivre aux Etats-Unis serait le paradis.

Or elle va y découvrir l’enfer. Une belle-mère tyrannique, un mari violent et alcoolique, une vie cloitrée au sous-sol. Elle devient l’esclave de sa belle-famille. Et, comble de l’horreur aux yeux de son mari et de sa belle-mère : elle met au monde quatre filles, pas un seul garçon. Quand Isra regarde ses filles, pense à l’avenir sombre qui les attend, elle sombre dans le désespoir et la culpabilité.

18 ans plus tard, on retrouve la fille ainée d’Isra, à Brooklyn. Deya va à son tour être mariée de force. Or sa passion pour les livres, qu’elle a héritée de sa mère, lui a ouvert les yeux sur l’existence d’un autre monde. Un monde où les femmes ont le droit d’étudier, d’avoir un emploi, de ne pas passer leurs journées à briquer la maison au service de leur belle-famille. Mais si comme Isra elle rêve de cet autre monde, elle ne va pas se contenter de rêver. Elle veut décider seule de son avenir. Et décide avec beaucoup de courage de prendre son destin et celui de ses sœurs en main.

Le pouvoir des livres

Le silence d’Isra est un magnifique roman écrit par Etaf Rum, elle-même réfugiée palestinienne aux Etats-Unis.

« Là d’où je viens, le mutisme est la condition même de mon genre. On nous apprenait à nous réduire nous-mêmes au silence, on nous apprenait que notre silence nous sauverait. Bien des années plus tard, je sais que tout cela est faux. Ce n’est que maintenant, en écrivant cette histoire, que je sens venir ma voix. »

Elle met en lumière le sort des femmes victimes de mariages arrangés, esclaves des hommes et de leur belle-famille. Pas de manichéisme ici, avec d’un côté les gentils et de l’autre les méchants. Avec beaucoup de finesse et d’intelligence, elle montre combien chacun est prisonnier du poids des traditions, peine à s’en extraire même s’il n’y adhère pas.

Ce livre est aussi un magnifique hommage au pouvoir de la lecture : ouverture d’esprit, évasion, distraction, découverte d’autres univers et modes de vie. Isra, comme sa fille ainée Deya ou encore Sarah la fille de la maison, trouvent leur salut dans la lecture. Dans l’indéniable pouvoir des mots. Même si parfois la lecture n’est qu’un accès aux rêves, elle peut aussi être un tremplin vers une autre réalité, être l’impulsion d’un changement.

Etaf Rum a le don de vous capturer dans le lasso de ses mots, de son intrigue, et de vous garder en otage de la première à la dernière page. Une histoire poignante, édifiante et une invitation à ne pas considérer impossible ce qui semble l’être. A ne jamais se résigner.

Enorme coup de cœur !

Informations pratiques

Le silence d’Isra, Etaf Rum – éditions Pocket février 2021 – 475 pages – 8,20€

Prochains livres sur le blog!

La semaine prochaine, retrouvez sur le blog, comme chaque semaine, des nouveautés littéraires pour adultes comme pour enfants.

Au programme de la semaine à venir

Côté littérature adulte :

  • Le silence d’Isra, d’Etaf Arum, aux éditions Pocket : Un roman impossible à lâcher, sur la condition des femmes victimes de mariages arrangés. Et un vibrant hommage au pouvoir des livres. A lire absolument!
  • Mais aussi le nouveau roman de Julien Sandrel, Vers le soleil, aux éditions Calmann-Lévy : Envie d’un séjour en Toscane? De douceur? De tendresse? D’amour? D’inattendu? Julien Sandrel vous offre tout cela et bien davantage au cœur de ses pages (et en plus ça rime! 😉 ) . Un pur bonheur de lecture!

Côté livre pour enfants :

  • Je vous parlerai d’un livre touchant : Le tricot, de Jacques Goldstyn, aux éditions la Pastèque : Quand on déroule le fil de la vie tel le fil d’une pelote de laine et que se tricote entre une grand-mère et sa petite-fille la plus belle des complicités.

Et bien sûr, des citations, des extraits chaque jour de la semaine !

La vie en relief, Philippe Delerm

la vie en relief

Un recueil lumineux de textes courts, dans lequel l’auteur savoure l’instant présent et chaque petit bonheur du quotidien. Des émerveillements que sa plume restitue avec grâce.

Des fragments de bonheur

« Vivre par les toutes petites choses. des sensations infimes, des phrases du quotidien, des gestes, des bruits, des odeurs, des atmosphères. Ecrire sur tout cela. Car écrire et vivre, c’est la vie en relief, une opération qui s’est imposée lentement. transformer en sujet ce qui n’en est pas un, la perspective est délicieuse. Elle donne le sentiment que l’existence est inépuisable, qu’il y aura toujours un angle différent à trouver, à chaque fois l’impression de respirer plus large, en ayant tiré de la vie même ce qu’elle contenait mais demeurait enfoui. »

Ces quelques phrases résument on ne peut mieux l’esprit de ce livre. A travers de sujets aussi anodins en apparence que le coup d’envoi d’un match de foot, le shoot dans une capsule de bière, ou une petite table de fer bleue, Philippe Delerm laisse les évènements infuser, diffuser, l’envahir, décanter. Dans nos vies modernes agitées, il prend le temps de se poser, d’observer, de sentir, ressentir. Et quand l’agitation s’est dissipée, quand le brouhaha s’est tu, ne reste que la substantifique moelle de l’existence, qu’il restitue avec sa délicate plume.

Des instantanés de vie

La vie en relief, paru en ce mois de février aux éditions du Seuil, est un concentré de poésie. Car Philippe Delerm a ceci de particulier qu’il a su garder intacte la capacité d’émerveillement propre aux enfants. En toute chose, il sait déceler le meilleur, le beau, le tendre. Il n’est jamais blasé ni las. Mieux : non seulement les êtres et les choses ne sont pas transparents dans son regard, mais il sait leur donner une consistance dans son écriture, en extraire la sève, la beauté, l’unicité. Nous en émerveiller.

A travers des instantanés littéraires, il nous invite à apprécier chaque période de l’existence, à ne pas verser dans la nostalgie, le regret. Chaque âge a ses bonheurs. Il s’agit d’en être conscient, de les apprécier. d’être riche, à chaque période de notre existence, de tout ce que l’on a vécu, de ce que l’on vit et qu’on vivra encore. Apprécions la beauté dans l’ordinaire des choses!

Un livre à déguster et non à dévorer.

Informations pratiques

La vie en relief, Philippe Delerm – éditions du seuil, février 2021 – 240 pages – 16€