Une femme célèbre, Colombe Schneck
Editions Stock 2010
(Un)happy end
Un mari, un enfant, un amant, un travail de journaliste à la radio et à la télévision, un premier livre à son actif, Jeanne Rosen a une vie bien remplie. Et pourtant, un vide se creuse en elle, de plus en plus grand. Un précipice dans lequel elle risque de tomber. Cette place qu’elle occupe dans les medias, sans dispositions particulières pense t-elle, lui paraît indiciblement fragile. Et son roman sulfureux à succès sur la vie sexuelle débridée de sa grand-mère, aurait-il été édité sans son amant W., influent critique littéraire? Alors que tout lui réussit, et justement parce que tout lui réussit, Jeanne est criblée de doutes. Trop de chance. Sentiment d’usurper une place. Crainte térébrante de tout perdre à chaque instant. Et les courriers assassins du public de ne pas la rassurer.
Un soir, une révélation : un documentaire sur la vie et la chute d’une étoile oubliée du petit écran des années soixante : Denise Glaser.
Et ce soir-là, une évidence : sa propre disparition est programmée. Son fauteuil est un siège éjectable.
Avec dextérité, fluidité, finesse, Colombe Schneck dresse un portrait croisé de ces deux femmes et souligne la fragilité de cette profession soumise aux aléas des revirements politiques, aux intrigues et autres effets de mode.
Car qui aurait cru que Denise Glaser, au don sans pareil pour dénicher le talent chez les autres, celle dont l’émission phare Discorama lança la carrière de Barbara, Catherine Lara, Véronique Samson pour ne citer qu’eux, finirait dans la solitude et dans l’oubli ? Elle qui ne vivait que pour la télévision, réjouie de faire découvrir de nouvelles voix, a été remerciée en 1975 pour raisons politiques. Longtemps, elle a espéré revenir. L’homme à la rose ne le lui avait t-il pas promis? Si. Tant de fois….
Et les autres, tous ceux qu’elle avait défendus, présentés, quitte à prendre des risques pour les imposer? Peu lui furent fidèles.
Celle qui présenta ce rendez-vous dominical avant-gardiste, introduit par le générique de « J’ai du bon tabac dans ma tabatière », ne reviendra jamais à l’antenne.
C’est un très bel hommage, sobre et touchant, associé à une réflexion pertinente sur la cruauté et la vulnérabilité du monde des médias, que nous livre ici Colombe Schneck.