Citation du jour

« Je n’écris pas avec de l’encre. J’écris avec ma légèreté. Je ne sais pas si je me fais bien entendre : l’encre, je l’achète. Mais la légèreté, il n’y a pas de magasin pour ça. Elle vient ou ne vient pas, c’est selon. Et quand elle ne vient pas, elle est quand même là. (…)
Et si en même temps elle est rare, d’une rareté incroyable, c’est qu’il nous manque l’art de recevoir, simplement recevoir ce qui nous est partout donné.  »

 

Christian Bobin – La folle allure

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Charmer, s’égarer et mourir, Christine Orban

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Charmer, s’égarer et mourir, Christine Orban

Albin Michel, avril 2016

Charmer, s’égarer et mourir, où la vie d’une reine, Marie-Antoinette, qui à défaut d’avoir réussi sa vie, aura réussi sa mort…

Christine Orban a 20 ans, quand elle découvre dans la bibliothèque d’amis, la vie de Marie-Antoinette sous la plume de Stefan Zweig. Un choc. Une rencontre. Les années passent, mais le personnage continue de la hanter. Et de naître en elle le désir de mieux appréhender cette reine dont on dit tout et son contraire, d’approcher au plus près de la vérité de son être. Reine martyre ou reine scélérate ? Femme légère, irréfléchie, indifférente aux autres, ou femme courageuse et volontaire ?

Et si Marie-Antoinette avait été victime de son époque, trop moderne pour son siècle ?

Avec beaucoup de sensibilité, Christine Orban s’engouffre dans le sillage de la reine, de son arrivée en France à l’âge de 14 ans à son passage sur la guillotine à 38 ans. Et nous fait partager les faits connus et méconnus de son quotidien. Un quotidien ô combien encombré d’étiquettes, de protocole, où du lever au coucher, elle est sans cesse épiée, critiquée, contrainte. Jamais un moment d’intimité, de liberté. Jamais un instant pour être elle-même. Pour se retrouver. Alors la jeune reine, corsetée par toutes ces obligations, décide d’envoyer valser les étiquettes, de chercher l’amusement avec une volonté farouche à la mesure de son étouffement. De respirer. Mécène, protectrice des arts, égérie des modes, elle s’étourdit dans une vie de plaisirs et de somptuosité, dilapidant les deniers publics. Ce qui lui vaudra d’être haïe, calomniée et condamnée.

Il lui faudra la solitude de sa cellule pour vivre un face à face avec elle-même, réfléchir, s’élever. « Absente à elle-même jusqu’à 35 ans, elle s’habite enfin au moment d’affronter l’épouvante, sans sorties dérobées, sans clefs, sans grottes, sans grilles, sans aucun repli, sans masque, sans mèche sur les paupières mi-closes, mais les yeux grands ouverts sur la terreur ». Elle y puisera un incommensurable courage, pour les siens, pour la couronne.

Dans ce roman historique, Christine Orban entre en guerre contre les préjugés et dresse de la reine un portrait humain, sensible, émaillé d’anecdotes. Mais si cette empathie que l’auteur sait d’emblée créer avec son personnage m’a séduite, j’ai à contrario un peu peiné avec la construction décousue du roman. Un livre apprécié donc, mais ce n’est pas un coup de cœur comme ce le fut pour le précédent « Quel effet bizarre faites-vous sur mon coeur » (Albin Michel 2013).

Citation du jour

« Nos besoins sont nos petits rêves quotidiens. Ce sont nos petites choses à faire, qui nous projettent à demain, à après-demain, dans le futur ; ces petits riens qu’on achètera la semaine prochaine et qui nous permettent de penser que la semaine prochaine, on sera toujours vivants. »

 

La liste de mes envies – Grégoire Delacourt

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Citation du jour

« Après avoir profité de tous les biens de ce monde dans la juste mesure de mes moyens et de mes forces, je puis, sans hypocrisie, constater ici que, de toutes les jouissances, celles qui proviennent de l’amour des livres sont, sinon les plus vives, tout au moins les plus facilement et les plus longtemps renouvelables. Au jeu, on ne gagne pas toujours ; avec les femmes, la vieillesse arrive avant la satiété. Il y a bien aussi la table! Mais quand on a bu et mangé pendant 2 heures, il faut s’arrêter. La pêche! La chasse! dira-t-on. – Pour la pêche il faut de la patience et du poisson; pour la chasse il faut de la patience et du gibier. Pour le livre, il ne faut que le livre. »

 

Albert Cim – Le goût des livres (Mercure de France)

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Citation du jour

« Il en est des livres comme des femmes, chez qui une certaine simplicité de manières et de toilette est plus engageante que l’éclat du fard, des grands airs et des atours, lequel peut bien éblouir les yeux, mais ne saurait toucher le cœur. »

 

Hume – Le goût des livres (Mercure de France)

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Les yeux couleur de pluie, Sophie Tal Men

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Les yeux couleur de pluie, Sophie Tal Men

Éditions Albin Michel, mai 2016

 

En raison de son classement moyen lors des examens, Marie-Lou n’a guère le choix pour son internat. Ce sera Brest, autrement dit, pour cette villageoise de Haute-Savoie, le bout du monde. Le Finistère ne signifie-t-il pas « la fin de la terre » ?

Fin de la terre mais début d’un nouveau monde, celui de l’internat en neurologie. Cadences infernales, confrontation aux cas douloureux de patients condamnés, situations d’urgence à gérer seule, rivalités et guerres intestines, pression de la réussite, mais aussi blagues potaches, anecdotes croustillantes, intrigues amoureuses et fêtes entre futurs médecins pour décompresser des tensions écrasantes du quotidien. Un rythme effréné et une charge de travail qui laissent peu de temps pour la vie privée. Une vie couleur de pluie, non pas en raison du climat breton (la bretonne que je suis s’insurge), mais en référence à la couleur des yeux de Matthieu, le cousin de la colocataire de Marie-Lou. Au premier échange de regards, elle s’est sentie électrisée. Et tandis que Matthieu semblait lui aussi aimanté, c’est une grande ambivalence qu’il manifeste à chacune de leurs rencontres depuis. Une forme de désir mêlé de peur.

Et Marie-Lou de s’interroger : joue-t-il avec elle ? Pourquoi cette retenue ? Cet ours solitaire parviendra-t-il à lui faire une place dans sa vie ?

Les yeux couleur de pluie est un roman léger, rafraîchissant comme une brise bretonne. Une histoire d’amour sur fond de quotidien hospitalier, avec ses rires, ses sourires, ses peurs, ses doutes, qui se lit facilement agrémenté de quelques rayons de soleil printanier.

 

Informations pratiques :

262 pages ; 17,5€

 

Prix Folire 2016

C’est au tour de Mazarine Pingeot – après PPDA, Bernard Pivot, Michel Drucker, Alexandre Jardin et de Marina Carrère d’Encausse – de parrainer le « Prix FOLIRE 2016 » mis en place par le CHS de Thuir, la Caisse d’Epargne Languedoc-Roussillon et le CML, un prix littéraire qui permet aux personnes souffrant de troubles psychiques de couronner la qualité littéraire d’un jeune auteur francophone.

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Miguel Bonnefoy est écrivain et partage ses racines entre la France, le Chili, et le Venezuela. En décembre 2014, ce fils de diplomates rejoint l’Etat de Bolivar pour une excursion particulière : gravir la montagne de l’Auyantepuy et redescendre en rappel aux abords de la cascade la plus haute du monde. Il a tiré un roman de son aventure Jungle (Ed. Paulsen)

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Éric Genetet vit depuis vingt ans à Strasbourg. Journaliste, il a travaillé dix ans dans le monde de la radio. Son roman  Tomber  (Ed. Héloïse d’Ormesson) est le récit poignant d’un enfant blessé, en échec scolaire, dont le rêve, simple et pourtant inaccessible, est d’être aimé par ses parents.
Avec une infinie douceur, Eric Genetet nous offre un roman magnifique et bouleversant.

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Avant de se lancer dans l’aventure romanesque, Elsa Flageul a d’abord étudié le cinéma et travaillé sur l’œuvre de Jacques Demy.
Son roman sélectionné Les Mijaurées (Ed. Julliard) traite des amitiés adolescentes. Elsa Flageul trace le portrait de deux jeunes femmes d’aujourd’hui que rien n’aura réussi à faire renoncer à leur amitié, même dans les moments les plus dramatiques.

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Citation du jour

« La vie en société c’est quand tout le monde est là et qu’il n’y a personne. La vie en société c’est quand tous obéissent à ce que personne ne veut. L’écriture c’est une façon d’échapper à cette misère, une variation de la solitude au même titre que l’amour ou le jeu – un principe d’insoumission, une vertu d’enfance.  »

 

Christian Bobin – L’inespérée

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