Le Horla, de Guillaume Sorel, d’après l’oeuvre de Maupassant (Editions Rue de Sèvres)

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Le Horla, de Guillaume Sorel

D’après l’œuvre de Maupassant

Éditions Rue de Sèvres, mars 2014

Le narrateur profite paisiblement de sa maison normande avec vue imprenable sur la Seine. Un quotidien qui se partage entre écriture et balades dans la nature, dans un climat d’une absolue sérénité. Jusqu’à ce jour où il voit passer un magnifique trois mats brésilien. Peu de temps après, un sentiment d’inquiétude le gagne qu’il ne parvient pas à identifier. Encore moins à juguler. Y a t-il un rapport entre cette angoisse de plus en plus forte et ce bateau? Pire, la nuit, sa maison est le théâtre de phénomènes étranges : les carafes d’eau et de lait sur son chevet se vident… Qui les boit? Et notre homme de faire des cauchemars atroces, la poitrine serrée dans un étau, le corps en nage, oppressé, exsangue, comme aspiré par une force surnaturelle, force qu’il nomme Le Horla. A croire qu’un être invisible, une forme de vampire, se nourrit de sa vie et réduit son âme à l’esclavage. Impossible de le fuir. Impossible de s’en défaire. Le Horla est partout, voire même peut-être en lui… Le duel dès lors commence et ne pourra s’achever que par une mise à mort.

Avec cette magnifique bande dessinée, Guillaume Sorel revisite le célèbre conte fantastique de Maupassant. Une adaptation fidèle à l’original et particulièrement brillante. Le graphisme est sublime, le duel entre le narrateur et Le Horla décrit avec une puissance émotionnelle rare. Chaque planche est un bijou d’inspiration, de couleur, de puissance évocatrice.

Un très très bel album!

A l’occasion de la sortie de l’album, Guillaume Sorel expose les planches de « Le Horla » à la galerie 9ème art (4 rue Cretet, Paris 9) jusqu’au 5 avril 2014.

La Kar’interview de Stéphane Bellat

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En ce mois de mars, Stéphane Bellat nous a offert un bouleversant roman chez M.A. éditions : La chambre d’Hannah. Si La Chambre d’Hannah plonge ses racines dans l’Histoire la plus sombre, c’est aussi le roman sensible et lumineux d’une amitié entre deux enfants qui n’ont, au premier abord, rien en commun : ni leur condition, ni leur époque. Avec, en filigrane, ces deux questions essentielles : jusqu’où aller par amitié ? Sommes-nous prêts à croire l’impossible ?

Rencontre avec l’auteur :

Karine Fléjo : Vous abordez cette période sombre de l’histoire, la seconde guerre mondiale, à travers un prisme très intéressant, celui du regard d’un enfant. Un enfant n’a pas de préjugés, cherche à comprendre, pose un regard neuf sur ce qui l’entoure. Il ose poser des questions, toutes les questions, là où bien souvent les adultes s’abstiennent ou ne s’interrogent même pas.

Stéphane Bellat : Oui, un enfant va se focaliser plus sur les sentiments et les sensations. Cela m’a rappelé un peu Saint Exupéry dans Le Petit Prince. Il dit en l’occurence : si pour décrire votre maison vous dites à un adulte qu’elle a les murs blancs avec des tuiles roses, des volets bleus et que tous les jours les oiseaux viennent s’y poser, un adulte ne comprendra pas. Si vous lui dites : j’ai une grande maison de 100 000 francs, il vous répondra : Ah, qu’elle est belle! L’enfant et l’adulte ne portent pas leur attention sur les mêmes choses…

KF : C’est là toute la différence en effet. Dans votre roman, l’action se déroule sur deux périodes. Aujourd’hui à Paris, dans le quartier de Belleville. Et cinquante ans plus tôt, au coeur de l’occupation, exactement sur les mêmes lieux. Vous êtes spécialiste de la seconde guerre mondiale et avez mené plusieurs conférences à ce sujet. Cela vous a t-il aidé pour aborder ce livre?

SB : Oui, j’ai été aidé pour écrire La chambre d’Hannah par les conférences dans lesquelles j’ai été amené à intervenir, conférences autant pour les adultes, voire à des professeurs d’histoire, qu’à des enfants. Et à cette occasion je me suis aperçu que les questions n’étaient pas du tout les mêmes, que celles des enfants, à la limite, étaient bien plus pertinentes. Et j’ai donc choisi de décrire la guerre à travers le prisme légèrement déformant des enfants.

KF : Cela donne un récit d’autant plus touchant. Des enfants, Pierre et Maxime, qui par ailleurs n’ont pas ces hésitations que nous pouvons avoir, nous adultes, et décident sans plus attendre de venir en aide à Hannah et sa famille, menacée de déportation. C’est une évidence pour eux qu’il faut faire quelque chose.

SB : Ce n’est pas compliqué : si Pierre n’arrive pas à sortir Hannah de là, elle va mourir, finira en camp de déportation et sera gazée. Si l’amitié d’Hannah était retirée à Pierre, il finirait par mettre fin à ses jours.

KF : oui, c’est finalement une relation d’amitié où chacun est le sauveur de l’autre. Pour Pierre l’ambiance à la maison est si délétère qu’il n’a plus goût à la vie. Pour Hannah, c’est la menace de déportation. C’est un sauvetage réciproque de deux enfants à un moment charnière de leur vie.

SB : L’un ne peut pas vivre sans l’autre, oui. Ou les deux s’en sortent ou aucun ne s’en sort. C’est ou tout ou rien. J’avais envie d’écrire une histoire forte entre des enfants…

Mission accomplie et ô combien brillamment! Ce récit vous bouleversera et longtemps resteront en vous Pierre, Maxime et Hannah… A lire absolument!

                                                                                 Propos recueillis le 14 mars 2014 

Retrouvez la chronique consacrée à ce roman coup de coeur en cliquant sur ce lien : https://leschroniquesdekoryfee.wordpress.com/2014/03/24/la-chambre-dhannah-de-stephane-bellat-m-a-editions-attention-coup-de-coeur/

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Rencontre privilégiée avec David Foenkinos, pour La tête de l’emploi (éditions J’ai lu)

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Dimanche 22 mars dernier, David Foenkinos a accepté de se prêter avec une ineffable gentillesse et l’inénarrable humour qui le caractérise à une rencontre avec ses lecteurs, dans le cadre des conférences du Salon du livre de Paris.

Rencontre privilégiée avec l’auteur :

Revenons sans tout reprendre en détail, sur votre parcours. Vous avez fait beaucoup d’autres livres avant La tête de l’emploi, dont un premier roman, « Inversion de l’idiotie : de l’influence de deux polonais », en 2001 chez Gallimard. Vous avez reçu le prix Roger Nimier avec « Le potentiel érotique de ma femme » en 2004. Il y a eu « La délicatesse » qui en 2009 vous a porté au sommet de ces auteurs qui sont si largement aimés.  Mais aussi, sans tous les citer, Lennon, Nos séparations, En cas de bonheur, Les souvenirs, Je vais mieux, et, récemment, La tête de l’emploi. Quels sont les auteurs qui vous ont influencé ?

David Foenkinos : Je pense que tout écrivain est le fruit des lectures qui l’ont influencé. Dans ma vie au quotidien sont majeurs les écrivains tels Kundera, Philippe Roth, mais aussi la littérature russe, celle des pays de l’est. Ou encore Albert Cohen ou Romain Gary.

Votre roman repose sur un personnage, Bernard. Vous êtes obligé de parler du prénom.

DF : On savait que pour Bernard cela allait mal se passer. Il y avait une sorte d’autoroute du Bernard qui faisait que le roman était limpide, déjà là. J’ai toujours été très excité par les clichés, par ce que peuvent véhiculer les prénoms ou les pays. J’ai toujours aimé les raccourcis, évidemment ils sont souvent de mauvaise foi, ils sont faux. Quand je voyage je demande qu’on m’explique tous les clichés véhiculés à travers une nationalité. En Hongrie, ils sont par exemple toujours déprimés avant même de recevoir la nouvelle. Ils sont en avance sur leur propre déprime. Donc Bernard on peut comprendre que ce n’est pas un prénom gagnant, qu’il y a un potentiel de l’échec.

En même temps on sent qu’il y a tout du long une tendresse réelle pour ce personnage, pour ses côtés ridicules.

DF : C’est un livre sur la crise, sur une succession de difficultés, sur la brutalité dans la vie professionnelle, né d’un reportage que j’ai vu à la télévision. Je l’ai tout de suite pensé en termes de comédie. J’ai tout de suite vu un homme de 50 ans qui retournait à la case départ, vivre chez ses parents et qui se faisait engueuler car il ne se brossait pas les dents le soir. Un type obligé de regarder avec ses parents Questions pour un champion tous les jours et Des chiffres et des lettres avant, Des chiffres et des lettres que j’estime être une forme de préliminaires orgasmiques à Questions pour un champion. (rires) On sent qu’il a une fragilité ontologique, liée au fait que ses parents l’ont élevé comme on élève un mollusque, à l’idée que ses parents ont fait un enfant comme on fait une expérimentation. Ce qui m’a intéressé, c’est que la crise de Bernard va permettre à tous les personnages, y compris aux parents, de commencer à réfléchir sur eux-mêmes, de se remettre en question. Finalement il va embarquer tout le monde dans son histoire. La crise de Bernard va être contagieuse.

C’est peut-être aussi une question de génération. Si Bernard semble si désillusionné, c’est aussi que lui, comme ses parents, était dans l’idée qu’il était assuré de garder son travail, de rester en couple tant bien que mal,de traverser les années sans changement majeur. Or tout s’écroule dans l’époque contemporaine : crise de la famille, crise du travail.

DF : Oui. Bernard est acculé pour la première fois de sa vie à devoir ne plus se reposer sur ce qu’il est. Il doit prendre des risques, inventer, se modifier. Ce livre, outre l’aspect comédie, c’est l’histoire d’un homme qui va devoir retourner à la case départ, qui n’a pas forcément les armes et va devoir aller les chercher. C’est alors qu’il va découvrir qu’il a un potentiel insoupçonné en lui, une grande capacité au rebond. J’aime l’idée que face à la brutalité de ce monde, on ait en soi des possibilités de rebondir. Il va recommencer une nouvelle vie et non « refaire » sa vie. Refaire sa vie : c’est une expression qui est tellement dans le langage commun mais que je trouve si terrible. Refaire sa vie ça veut dire quoi, qu’on a raté la première, qu’il faut tout refaire ? Non, on ne refait pas les choses, on les continue avec l’expérience de nos échecs.

Dans le film d’Etienne Chatillez, Tanguy, cela faisait beaucoup rire qu’à 30 ans on soit toujours chez ses parents. Maintenant on rit plus jaune car non seulement les enfants sont toujours chez leurs parents à 30 ans mais ils y reviennent à 50 ! On n’a plus que 15/20 ans de tranquillité en tant que parents !

DF : Oui, avec ce phénomène de société, il faut savoir ce que cela implique de faire des enfants (rires).

Il y a beaucoup d’inconvénients à retourner vivre à 50 ans chez ses parents, surtout quand ils sont si rigides.

DF : Oui, on est dans une sorte de mausolée de la vieillesse. Ses parents sont figés. Et Bernard va les propulser dans sa crise. Leur rigidité va fléchir. On marche sur des patins à la maison, comme s’il fallait survoler les jours, ne pas laisser de traces, glisser. Et enfin ils vont froisser leur quotidien, et c’est ça qui est intéressant. Ce qui m’intéresse dans un roman, c’est de commencer avec des clichés, une forme de grossièreté narrative y compris ici dans le caractère de Bernard, dans qui il est. Pour moi je ne suis pas du tout dans la finesse au début du livre, Bernard est presque du carton-pâte. L’avancée du roman, l’excitation du roman, c’est de progresser dans la finesse (finesse psychologique, finesse des situations) pour qu’elle devienne plus complexe. On affine le personnage progressivement, sans en faire un parangon de subtilité, mais on s’attache à lui, on le voit capable de mener sa vie de façon un peu plus habile.

Une des grandes vertus de ce livre est qu’il peut être lu à plusieurs niveaux. C’est un des paradigmes du plaisir de lecture.

DF : Oui, c’est une comédie légère sur la crise, mais pas seulement. Il y a plusieurs degrés de lecture. Ce qui m’intéresse c’est de travailler les profondeurs cachées d’une histoire.

Propos recueillis le 23/03/2014. ©Karine Fléjo

Tout savoir sur…Leurs années Sciences Po, de Guy Jacquemelle ( éditions Kawa)

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Michel Rocard, Lionel Jospin, Hubert Védrine, Olivier Duhamel, Laurent Joffrin, Michèle Fitoussi, Jean Christophe Rufin, MarieLaure Sauty de Chalon, Ariane Chemin, David Pujadas, Anne Roumanoff, Raphaëlle Bacqué, Chantal Jouanno, Rama Yade, Loona Corrente et Vincent Galibert évoquent leurs années rue SaintGuillaume.
Pourquoi ont-ils fait Sciences Po ? Comment s’y sont-ils préparés ? Que pouvaient-ils répondre aux questions : le Sénat, mythe ou réalité ? Comment sait-on si on est de droite ou de gauche ? Le premier ministre est-il un fusible ou un paratonnerre ? Qui a été la première femme transférée au Panthéon ? Quels sont leurs bons et mauvais souvenirs de la rue Saint-Guillaume ? Quels professeurs les ont marqués ? Quel regard portent-ils aujourd’hui sur cette période et cette école ? Michel Rocard, Lionel Jospin, Hubert Védrine, Olivier Duhamel, Laurent Joffrin, Michèle Fitoussi, Jean-Christophe Rufi n, Marie-Laure Sauty de Chalon, Ariane Chemin, David Pujadas, Anne Roumanoff, Raphaëlle Bacqué, Chantal Jouanno, Rama Yade, Loona Corrente et Vincent Galibert racontent leurs années rue Saint-Guillaume.
Il y avait bien d’autres façons d’aborder ce livre sur Sciences Po. L’angle choisi ici permet à ces personnalités d’évoquer avec distance ou passion, ironie ou nostalgie, leurs «années Sciences Po».
Une même aventure les réunit, qui vient des années studieuses, douloureuses pour certains, dilettantes pour d’autres, passées dans cet antre germanopratin. Et si vous aussi, vous souhaitez préparer l’examen d’entrée, ils vous donnent de précieux conseils.

La chambre d’Hannah, de Stéphane Bellat (M.A. Editions) : attention, coup de coeur!

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La chambre d’Hannah, de Stéphane Bellat

Éditions M.A., mars 2014.

Paris, février 1992. Pierre Descarrières, âgé de onze ans, est un petit garçon mal dans sa peau. Difficile de trouver sa place à la maison, théâtre des disputes quotidiennes de ses parents. Tout aussi compliqué de s’épanouir à l’école où ses oreilles décollées et ses cheveux roux lui valent mille et une railleries. Alors Pierre sombre dans une solitude et une tristesse insondables. S’il n’a pas le courage de mettre fin à ses jours, il n’a pour autant plus envie de vivre. Et c’est alors qu’il médite sur son sort que surgit Hannah. Hannah Klezmer, une fillette juive de son âge. D’emblée, elle s’attire sa sympathie, lui inspire confiance. Mais d’où vient-elle? Pourquoi l’a t-elle choisi, lui, Pierre Descarrières? Pourquoi emploie t-elle des mots venus d’un autre âge? Et surtout, quels sont ces dangers qui la menacent? Bien des questions que Pierre est décidé à élucider.

Au fil des jours, les liens d’une philosophale amitié se tissent entre les enfants. Chacun reconnaît en l’autre son âme-soeur, son essentiel. Mieux : chacun doit à l’autre d’être en vie…et d’espérer le rester. Une rencontre que Pierre ne souhaite pas partager avec les adultes : « Je ne voulais partager Hannah avec personne, c’était ma découverte. Et puis après tout c’est moi qu’elle avait choisi. ». Personne, enfin pas tout à fait. Car Maxime, son copain et complice de la première heure, est bien entendu dans la confidence. Et tous les deux d’entreprendre de sauver Hannah et sa famille.

Avec La chambre d’Hannah, Stéphane Bellat, spécialiste de la seconde guerre mondiale, nous invite à revisiter cette période sombre par le prisme du regard d’un enfant. Un regard neuf, sans préjugé, curieux, sensible. Le regard d’une âme pure. Mieux, l’auteur nous offre de concrétiser le rêve de nombre d’entre nous : pourvoir changer le passé et par là même, faire triompher le bien sur le mal. Où quand l’amitié entre enfants sauve de la barbarie des adultes…

Avec une émotion à fleur de plume, l’auteur nous entraine sur les pas de Hannah, au coeur de la folie meurtrière des hommes. Le rythme est soutenu, la tension extrême, la construction remarquable, les personnages indiciblement attachants. Impossible de poser le livre une fois la lecture commencée. Vous l’aurez compris, ce roman bouleversant, véritable ôde à la force de l’amitié, est un vrai coup de coeur!

P9 : Les enfants naissent parfaits. C’est lorsqu’ils grandissent que le monde des adultes leur transmet ses défauts.

P87 : Dieu était bâti à l’image des adultes qu’il avait créés, il promettait beaucoup et rien n’allait jamais plus loin. Je crois que, s’il avait eu l’idée de construire Adam et Eve dans des corps d’enfants, le monde serait moins cruel et déprimant.

P113 : On est mort le jour où on cesse de croire en soi.

Les Thermes du Paradis, de Akli Tadjer (éditions JC Lattès)

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Les Thermes du Paradis, de Akli Tadjer

Éditions Jean-Claude Lattès, mars 2014

Adèle Reverdy est une jeune femme pleine de complexes et, pour comble de malheur, les hommes la fuient dès qu’elle avoue son métier de croque-morts.

Mais sa vie va changer le jour de ses trente ans. Parmi les invités venus à la fête organisée par sa sœur, il y a Léo, ancien trapéziste devenu aveugle à la suite d’un accident puis masseur aux Thermes du Paradis. Un soleil noir dans la vie d’Adèle qui, aidée de sa meilleure amie Leila, talentueuse thanatopractrice, va tout faire pour conquérir le cœur de Léo.

Un roman plein d’humour et de tendresse où l’on découvre que l’on ne voit bien qu’avec le cœur et que l’essentiel est invisible pour les yeux…

La malédiction de la chanson à l’envers, de Marie-Christine Buffat (éditions Snow Moon)

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La malédiction de la chanson à l’envers, de Marie-Christine Buffat

Illustrations de Anne Kervella

Éditions Snow Moon, mars 2014

(à partir de 8 ans)

Tout a commencé lors du match de foot. L’équipe de Lulu a perdu, en grande partie à cause de Martin. Il faut dire que Martin ne cesse de s’empiffrer de pâtisseries depuis le départ de son père du domicile familial. Alors forcément, il est devenu trop gros pour courir derrière le ballon. Dans les vestiaires après la rencontre, c’est sa fête. On le chahute, on raille ses kilos en trop. Sauf que Martin, ça ne le fait pas rire, mais pas du tout même. Et un joueur de l’équipe adverse de voler à son secours : « Si tes copains te font des misères, fais-leur écouter la dernière chanson des School Underworld à l’envers. Pas sûr qu’ils s’en remettent. Et surtout, bouche-toi bien les oreilles si tu ne veux pas atterrir dans un asile de dingues ou devenir comme la fille qui joue dans l’exorciste!  » Et Lulu et ses copains de s’interroger. Ils connaissent bien ce groupe de musique métal, complètement déjanté, dont les musiciens apparaissent toujours grimés. Alors quelle est cette rumeur satanique selon laquelle écouter ce titre à l’envers ferait se déconnecter le cerveau? Info ou intox?

Quelques jours plus tard, c’est l’ébullition à l’école : Martin a disparu… Plus troublant encore, il a disparu en même temps que Trash Clash, qui n’est ni plus ni moins que le célèbre batteur du groupe School Underworld! Coïncidence? Lien? Et si Martin avait été victime de la malédiction? Stupeur et tremblements. Lulu, Nathan, Julien et Line ont bien une petite idée, voire une piste, mais les adultes, comme toujours, refusent de les écouter et ne comprennent rien à rien. Qu’à cela ne tienne, ils mèneront leur enquête tout seuls!

Avec La malédiction de la chanson à l’envers, Marie-Christine Buffat nous entraine au pas de course dans le sillage de Ludovic et de ses amis. Si vous voulez faire le plein de frissons, de tendresse, d’humour, de fraicheur, si vous cherchez une merveilleuse aventure qui vous tienne en haleine, venez donc chercher Martin avec l’auteur! Car alors vous passerez un excellent moment au coeur de ces pages.

Un récit enlevé pour enfants de 8 à… 88 ans!

Site de l’éditeur : http://www.snow-moon.biz/

Glissez Corinne Royer dans votre poche!

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La vie contrariée de Louise, de Corinne Royer

Editions Pocket mars 2014.

Juste avant de s’éteindre aux Etats-Unis, son père lui a tendu un petit papier, sourire collé aux lèvres, accompagné de ces derniers mots : « Louise, c’est ta grand-mère de France ». Une adresse, celle de la maison de retraite de Louise, en Auvergne, sur les terres du village de Le Chambon-sur-Lignon. Et rien d’autre. Juste la première pièce d’un puzzle, celui de ses origines, qu’il va alors tenter de reconstituer.

Mais lorsque James Nicholson débarque en France, dans le village de sa grand-mère, seul être à pouvoir éclairer les parts d’ombre de sa vie, il est trop tard. Elle est décédée le matin même. Consternation et douleur. La mémoire de James est-elle condamnée à rester amputée de son passé? Louise va t-elle être enterrée avec ses secrets? Non, car la vieille femme lui a laissé un cahier rouge, cahier intime où elle a consigné toute son existence, et par là même, celle de ce village qui protégea des milliers de juifs sous l’occupation. Une histoire personnelle qui rejoint la grande histoire.  Un destin qui croise celui de la seconde guerre mondiale.

La vérité est donc là, à portée de ses yeux, dans l’encre bleue de ces lignes. Mais si près du but, James est pris de doutes sur sa légitimité à pénétrer dans la vie de Louise au moment où elle vient de la quitter. Il trouve alors un compromis : « Les mots de Louise, il pourrait se résoudre à les entendre, mais pas à les lire. » C’est Nina, la serveuse de l’hôtel où il séjourne, qui sera sa liseuse, au rythme de dix pages par jour, le temps de s’imprégner progressivement de ces pans d’histoire qu’il ignore.

Louise, femme courage, de ces combattants de l’ombre qui au péril de leur vie ont accueilli, protégé et sauvé un grand nombre de juifs. Louise, amoureuse du beau Frantz, liaison ô combien scandaleuse à l’époque. Louise et ses secrets aux conséquences si lourdes…

Investie du difficile devoir de révéler à James ce que Louise a confié dans son cahier, Nina s’interroge. Toute vérité est-elle bonne à dire ? Doit-elle faire une lecture fidèle des confidences de Louise ou revisiter certains passages délicats? Dilemme…

Tels les cailloux du petit Poucet, Corinne Royer sème des indices tout au long des pages, lesquels finissent par former un chemin bouleversant jusqu’à la vérité, vérité qui sort des sentiers que le lecteur a pu échafauder. On suit avec émotion et curiosité James, Nina, Louise, Pierre, Antoine et les autres, des personnages auxquels l’auteur sait donner tant de chair, qu’on les visualise, on les imagine, on les voit. Une histoire indiciblement vivante, captivante, poignante.
Et l’écriture ! Dans « M comme Mohican », Corinne Royer nous avait déjà fascinés avec sa maitrise du style, la qualité de sa construction, son habileté à jongler avec les personnages. Elle récidive ici avec ce roman admirablement écrit, qui comblera les amoureux de la langue française et de la littérature.

Vous l’aurez compris, ce roman, tant au niveau du fond que de la forme, est un véritable délice de lecture !

Entorse, de Philippe Mathieu (éditions Buchet Chastel)

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Entorse, de Philippe Mathieu

Éditions Buchet Chastel, janvier 2014

La vie de Léo, 35 ans, s’écoulait jusqu’alors sur un long fleuve tranquille. Jamais il ne s’est vraiment foulé. Jusqu’à cette entorse dans l’écoulement des journées : le départ annoncé de Françoise, sa compagne depuis cinq ans. Pas plus qu’il n’avait identifié des signes d’usure dans le couple, il ne s’était projeté sans elle. Car Léo est incapable d’anticiper, incapable de se fixer des objectifs. «  Cela tenait à cette incapacité que j’avais depuis toujours à envisager l’avenir, à construire des projets, ressentant l’écoulement du temps comme une trajectoire circulaire qui chaque matin me ramenait à un début de journée dont rien n’indiquait qu’elle serait différente de la précédente ou de la suivante, et de même les années s’enchainaient, entrainant toujours les mêmes saisons. » Acceptant la décision de sa femme avec une forme de fatalisme, il démissionne de son travail et part. Ce qu’il va faire? Il n’en a nulle idée hormis se laisser porter par le cours des évènements, attendre que la vie décide pour lui. Comme il a toujours fait en somme. Direction Montpellier, ville où vit Pierre, son ami d’enfance, marié à Mathilde. Mathilde, qui n’est autre que le premier amour de Léo…

Avec Entorse, Philippe Mathieu nous entraine sur les pas d’un trentenaire attachant et touchant, roi de l’indécision et de l’inertie, mais désarmant de sympathie. Un roman tendre et plein d’humour.

La rue était mon lit, le poignant témoignage de Michel Baldy

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La rue était mon lit, de Michel Baldy

Avec Frédéric Veille

City Editions, mars 2014

L’avenue des Champs Elysées. Une adresse qui fait rêver les touristes, qui brasse au quotidien des milliers de passants. Un quartier aux enseignes prestigieuses, où les hommes d’affaires cravatés croisent les femmes sortant de chez les grands couturiers. C’est là que Michel a vécu pendant huit années. Là, sur un coin de trottoir devant le Monoprix. Peut-être l’avez-vous vu, peut-être l’avez-vous croisé. Mais lui avez-vous seulement souri? Vous êtes-vous arrêté? Ou comme nombre de badauds, ne lui avez-vous prêté aucune existence dans votre regard, de cette indifférence qui agresse, qui blesse, qui détruit? Il était pourtant là, entouré de ses deux plus fidèles compagnes, celles qui l’ont maintenu en vie, ses chiennes Grâce et Bowie.

«  On ne vient pas à la rue par choix ou par envie. On nous y pousse.(…) Derrière chaque histoire il y a un drame, un petit rien qui s’envenime, un coup de massue.  » Après une enfance chaotique, la perte de son jeune frère, des boulots précaires, le coup de grâce viendra de la demande de divorce de sa femme. Cette séparation est plus qu’il ne peut supporter, fait voler en éclats tout ce qu’il avait si péniblement construit. Elle entraine dans son sillage la perte de son emploi, de son toit, de ses rêves de stabilité. Alors un soir de septembre 2004, il réunit le peu d’affaires qu’il possède dans un sac à dos, prend ses deux chiennes et s’en va. Direction Paris. Et la rue de devenir son toit. Et la rue de devenir son lit.

Sa seule véritable angoisse : survivre. Froid, pluie, fatigue, faim, honte, mépris, indifférence, violence, vivre dehors c’est subir l’assaut permanent de ces maux. Heureusement, la sympathie et la gentillesse de Michel, toujours prêt à rendre service, lui valent des retours chaleureux des passants et des habitants du quartier. Un repas chaud, un journal, des cigarettes, de la nourriture pour ses chiennes, de quoi se payer une nuit d’hôtel, un sourire, des mots échangés. Des petits moments de paradis dans l’enfer du quotidien. Des oasis de douceur dans un monde de violence et d’alcool. « La manche, le froid, le sentiment de ne plus être vivant, l’alcool, la rue vous annihilent de tout. Mais jamais, jamais je n’ai perdu espoir, jamais je n’ai succombé à la tentation de succomber définitivement, de ne plus espérer.  » Et Michel Baldy a eu raison d’espérer. En cet hiver glacial de 2012, une main va lui être enfin tendue. Une chance va lui être enfin donnée.

Alors aujourd’hui Michel décide de témoigner. Pour insuffler cet espoir à ceux qui à ce jour, sont encore dans la rue.  » Ce que j’ai envie de leur dire, c’est qu’il ne faut jamais désespérer et que le jour où cette main se tend, il faut l’agripper et ne plus la lâcher« .

Un témoignage indiciblement émouvant qui, il faut l’espérer, redonnera de la densité aux SDF dans le regard des passants, là où bien souvent ils ne sont que transparence…

Retrouvez Michel Baldy dans ce court métrage consacré aux SDF « La misère d’un homme », un film de Sarah FRIKH, réalisé par Florent THOMAS.