Lire Serge Joncour, ce n’est pas juste tenir un ouvrage entre ses mains et en caresser les pages du regard. Lire Serge Joncour, ce n’est pas juste être captivé par une intrigue et être attaché aux personnages. Lire Serge Joncour, ce n’est pas juste plonger au coeur de l’humain et succomber à son irrésistible humour. Lire Serge Joncour, c’est bien plus que cela. C’est une immersion en trois dimensions, c’est voir, sentir, ressentir, toucher, frémir, trembler, frissonner, respirer, suffoquer, pleurer, rire, sourire, applaudir au diapason des personnages. Lire Serge Joncour, vous l’aurez compris, c’est VIVRE l’histoire qu’il nous offre. Un talent d’écriture rare. Et son nouveau roman, L’écrivain national, est à ce titre un bijou.
Rencontre avec l’auteur :
Quelle a été l’idée de départ de ce roman?
Le point de départ… En plus de la forêt, c’est l’idée d’impliquer un auteur dans le faits divers sur lequel il se penche, « mouiller » un auteur dans une histoire qui n’est pas la sienne et à laquelle il s’intéresse de trop près, le prendre au piège… Les faits divers sont un des germes majeurs de la littérature, Madame Bovary, Le rouge et le noir, même le Comte de Montécristo, et bien sûr toute une vague de publications récentes, et donc j’avais envie que mon personnage soit comme un tribu, une rançon, qu’il paye pour tout ce que la littérature doit aux faits-divers…
Quel en est le thème central?
L’écriture et le réel. Qu’est-ce qu’un écrivain, et quel est son rapport aux autres, peut-il vivre toutes les épreuves et les joies de sa vie sans l’arrière pensée d’en faire un jour un livre… ?
La forêt… Je la vis comme un élément à part, je le dis dans le livre, un océan vertical, un monde qui a ses règles, sa vie propre, et que mon personnage va peu à peu approcher, jusqu’à s’y perdre… dans tous les sens du terme. Et s’y retrouve aussi !
Le narrateur est écrivain de profession et s’appelle…Serge. Faut-il y voir une forme d’autofiction, le fait divers en moins?
Quasiment tout est vrai dans ce roman, beaucoup de ses personnages existent, il y a juste que je les ai rassemblés, éparpillés qu’ils sont dans le temps et dans l’espace. Il y a là des décors que je connais, des hôtels, des personnages, des médiathèques, je me suis évidemment inspiré de ces nombreuses rencontres en librairies et de ces ateliers d’écritures que j’anime depuis des années, des repas que j’ai pu faire dans les Vosges, des conversations que j’ai eues en Auvergne, enfin bref, j’ai rassemblé mille petits fragments de réel pour en faire une composition romancée, une intrigue… Pour le reste, allez savoir si le fait divers lui-même est si inventé que cela… ?
Les faits divers exercent une fascination étrange, voire parfois un voyeurisme malsain. Chacun veut voir, savoir, voire prétend savoir. Le narrateur, ici , a une intime conviction, mais il investigue pour la conforter ou devoir s’en écarter. Il fait montre d’un certain recul, ce qui n’est pas toujours le cas, surtout dans une société où l’information circule en temps réel, annonçant des conclusions avant même qu’elles ne soient établies. Est-ce une façon de dénoncer ces possibles dérives?
Complétement. Ce qui est fascinant quand un fait divers émerge de nos jours, ou un accident, une disparition, c’est que ce fait divers on le suit en temps réel ; on le commente, et il faut sans cesse réactualiser les informations que l’on a dessus ; on invite des experts, on digresse, on échafaude des hypothèses ; on crée des certitudes… Peut-être qu’on raconte n’importe quoi… Et très vite : on oublie ! Et malgré cette cavalerie médiatique, malgré la toute puissance d’investigation et des moyens de recherche de la police scientifique, de la gendarmerie, il n’empêche qu’il y a plein de faits divers qui restent de totales énigmes… L’affaire du docteur Godard, Dupont de Ligonnés, et cent autres.
Le lecteur, et ce n’est pas le fait de ce livre seul mais de chacun de vos romans, vous lit en trois dimensions. Car vous lire, c’est sentir, voir, toucher, ressentir tout ce que vivent les personnages, c’est être en immersion totale dans l’univers que vous nous décrivez. Comment travaillez-vous cette capacité extraordinaire à nous faire VIVRE et non seulement lire l’histoire?
Merci de me dire cela. C’est mon intention. Je crois que le roman est plus fort que le cinéma en 3D, on peut être totalement immergé dans un roman, en ressentir le froid, le chaud, les odeurs, la peur, le rire… C’est très vivant un roman, et lire sollicite les 5 sens… Je crois cela. Le roman est plus fort que tout, la télé, le cinéma, les jeux vidéo, sa faculté d’imprégnation est indépassable. D’ailleurs ne dit-on pas parfois, quand on lit un roman, que l’on est vraiment entré dedans, qu’on entre ou pas dans une histoire…
Que souhaitez vous partager avec vos lecteurs?
Les mêmes émotions. Je pense aux lecteurs quand j’écris. Je les imagine, là, derrière ; à venir. Et mine de rien dans ce roman, en plus de l’intrigue, pas mal de sourires… voire d’éclats de rire…
Si vous ne deviez citer qu’une phrase de ce roman, quelle serait-elle?
« Lire, c’est voir le monde par mille regards, c’est toucher l’autre dans son essentiel secret, c’est la réponse providentielle à ce grand défaut que l’on a tous de n’être que soi. »
Ou peut-être…
« Il y a des gens comme ça, s’y frotter c’est s’y rayer, dès lors qu’on les fréquente on est perdu. »
Retrouvez en cliquant sur ce lien, la chronique consacrée au nouveau roman de Serge Joncour, L’écrivain national !