Les fleurs de l’ombre, Tatiana de Rosnay

Les fleurs de l'ombre Tatiana de Rosnay

Nous sommes dans un futur proche, dans ces maisons et appartements connectés, dans lesquels l’intelligence artificielle rivalise avec celle de l’homme. Progrès ou menace pour notre intimité ?

Progrès technique ou perte de liberté ?

Clarissa doit trouver un logement au plus vite après la découverte de la liaison qu’entretient son mari. Certes, jusqu’alors, il lui avait déjà été infidèle, mais une liaison de cette nature, jamais. Impossible de rester un seul jour de plus sous le même toit. Aussi, quand elle entend parler d’une résidence d’artistes flambant neuve, CASA, elle dépose sa candidature. En tant qu’écrivain franco-britannique, elle est en effet tout à fait éligible.

Et d’être retenue, pour sa plus grande joie. Une joie de courte durée cependant. N’a-t-elle pas agi de façon trop précipitée ? Car elle qui a toujours accordé une si grande importance aux lieux, qui a toujours sondé leur âme, s’est jetée sur cet appartement sans vraiment le respirer, le ressentir, l’écouter.

Certes l’appartement offre une vue imprenable sur l’hologramme de la Tour Eiffel, tour détruite dans un des nombreux attentats qui ont marqué le monde ces dernières années. Certes, il est vaste, lumineux, avec un loyer très attractif et tout le confort. Certes, il est équipé des dernières technologies et son assistante virtuelle, une certaine Mrs Dalloway, répond à ses moindres demandes. Mais.

Mais elle se sent oppressée en ces lieux, cauchemarde, entend des bruits étranges, voit des pans entiers de son douloureux passé refaire surface. Même son chat, Chablis, réagit étrangement, comme apeuré. Sur la défensive. Fragilisée par un deuil quelques décennies plus tôt, son entourage la considère encore fragile. Aussi, quand elle partage son malaise avec sa fille Jordan, cette dernière pense qu’elle fait une rechute dans la dépression. Sans compter qu’en tant que romancière, Clarissa a une imagination débordante : ce sentiment d’être constamment épiée ne sortirait-il pas tout droit de son imagination ?

Seule sa petite fille, Andy, semble ne pas la prendre pour une folle.

Alors, paranoïa ou menace fondée ? Qu’est devenu Jim Perrier, l’autre résident à partager ses craintes ? Quelles sont les réelles intentions du docteur Dewinter, médecin très intrusif qui suit les habitants de la résidence ? Et toutes ces caméras dans l’appartement, visent-elles vraiment à assurer sa sécurité ou à épier ses moindres faits et gestes? Que cherchent-ils à apprendre d’elle?

Paranoïa ou réelle menace ?

Parmi les thèmes de prédilection de Tatiana de Rosnay, il y a la mémoire des murs, la façon dont les lieux influencent la vie de ceux qui s’y succèdent. Et Les fleurs de l’ombre ne font pas exception. La romancière fait monter le malaise au fil des pages, crée une atmosphère inquiétante, joue avec les nerfs du lecteur. Qui doit-il croire : Clarissa ou sa fille ? De quel côté doit-il pencher : paranoïa ou réelle menace ?

Le monde a changé, La planète a fait les frais des excès de l’homme : canicule, inondations, ouragans se sont succédé. Les attentats ont détruit les lieux les plus remarquables à travers la planète. L’homme s’est adapté, a imaginé des espaces de vie dans lesquels la technologie a pris une place de plus en plus grande. Trop grande ? Quel est le prix à payer pour plus de confort, plus de rapidité dans l’assouvissement de nos besoins ? Quels sont les dangers du tout connecté ? Quel est le coût du,progrès technologique pour l’homme?

Un roman au suspens savamment entretenu, envoûtant, dans lequel Tatiana de Rosnay offre à ses lecteurs un cadeau que son héroïne Clarissa aurait perçu comme un luxe : la liberté. Celle de trancher.

Livre pour enfant : Les petites victoires, Max et lapin

Les petites victoires, Max et Lapin

©Karine Fléjo photographie

Une nouvelle histoire tendre de Max et son doudou lapin, pour apprendre à l’enfant la notion de persévérance et l’aider à lutter contre le découragement.

Max apprend à skier

Pour la première fois, Max part à la montagne en hiver. Il va enfin pouvoir apprendre à skier! Accompagné de son amie Ginger, il se rend à sa première leçon le cœur joyeux. Seulement voilà, pendant que Ginger s’amuser à dévaler les pistes, Max multiplie les chutes. Au point d’être découragé. Heureusement, le soir son papa le console, le rassure. Mieux, il lui susurre un mot magique, un mot qui change tout quand on n’arrive pas au but qu’on s’était fixé.

Le lendemain, quand Max, bon nageur, se retrouve à la piscine avec Ginger qui contrairement à lui est peu à l’aise, c’est au tour de Ginger d’être découragée. Heureusement, Max peut lui enseigner la formule magique donnée par son papa et redonner ainsi le sourire à Ginger!

La collection Max et lapin

J’adore la collection Max et Lapin d’Astrid Desbordes et Pauline Martin, aux éditions Nathan. Une collection dans laquelle on retrouve à chaque fois Max et son doudou lapin, dans des situations du quotidien expliquées avec pédagogie aux enfants. C’est une façon très douce, très parlante et pédagogique d’aborder les peurs, inquiétudes ou émotions du quotidien avec les enfants. Ici, le petit Max se décourage car c’est la première fois qu’il se rend au ski, et comparé à son amie Ginger, habituée à skier, il peine. Alors son papa lui montre que l’important, c’est de persévérer, qu’il est normal de ne pas y parvenir la première fois. Au lieu de dire « je n’y arrive pas », se dire « je n’y arrive pas encore » change tout! Car cela laisse la porte ouverte au possible, à l’amélioration. Et fait disparaître le découragement!

Un tendre petit livre aux couleurs vives et aux personnages proches des enfants.

Informations pratiques

Les petites victoires, de Pauline Martin et Astrid Desbordes, collection Max et lapin – Editions Nathan janvier 2020 – 20 pages illustrées – 5,90€

A partir de 2 ans.

Un loup quelque part, Amélie Cordonnier

Un loup quelque part, Amélie Cordonnier

©Karine Fléjo photographie

Quand une femme accouche d’un bébé qui n’est pas celui qu’elle espérait et peine à l’aimer. La spirale infernale du rejet. L’évolution aux frontières de la folie. Puissant. Saisissant. Brillant.

L’amour maternel : inné ou acquis ?

Heureuse maman d’une fillette de 8 ans, elle a accueilli avec bonheur la naissance de son petit garçon. Comme une belle histoire d’amour qui se rejoue, à 8 ans d’intervalle, entre une maman et son bébé. Jusqu’à la fausse note cinq mois plus tard. Le bémol sur la partition de la peau du bébé : un étrange grain de beauté.

Le pédiatre lui énonce alors un verdict à peine croyable : ce n’est pas un grain de beauté ; son bébé est métis ! Elle n’a pourtant pas trompé son mari, est blanche et son conjoint aussi. Comment est-ce possible ? Pire : cette tâche brune dans le cou n’est que le début de la mue de l’enfant. Toute sa peau va devenir inexorablement teintée. Noire.

En état de sidération, la maman cherche à comprendre. Qu’est-ce qui peut expliquer le métissage de l’enfant ? Y-a-t-il quelque chose qu’on lui aurait caché sur ses propres racines ? Comment aimer un enfant différent de celui qu’on a imaginé, bercé dans son ventre, projeté ?

Terrifiée, la maman sent monter en elle un inexorable sentiment de rejet. Vite, le couvrir de vêtements, cagoule, gants, pour faire disparaitre la moindre parcelle de peau de son champ de vision. Vite, nier la réalité. Vite, refuser l’inacceptable.

Et dans le sillage de ce rejet, une terrible honte. Une écrasante culpabilité.

Parviendra-t-elle à identifier la raison de ce métissage ? Saura-t-elle tricoter un lien avec son enfant, l’aimer tel qu’il est ?

Un roman percutant sur la relation mère-enfant

J’avais plébiscité le premier roman d’Amélie Cordonnier, Trancher, il y a deux ans. J’attendais donc avec impatience de lire le deuxième, Un loup quelque part. Et je retrouve ici tout ce qui m’avait séduite dans son écriture. Une plume aussi acérée qu’un scalpel. Des mots qui coupent. Des phrases qui incisent. La relation entre la mère et son fils devient de plus en plus anxiogène, paniquante même, et Amélie Cordonnier est si juste dans l’expression des émotions de son personnage, dans l’analyse de la situation, qu’elle nous communique cette inquiétude : on oublie qu’on est le lecteur d’une fiction, on devient le témoin d’un quotidien terrifiant. Certes, le sujet est dur et j’avoue que le talent de l’auteure à nous entrainer dans son univers et à nous faire confondre réalité et fiction est tel, que parfois j’ai eu du mal avec ce lien mère-enfant qui ne s’établissait pas et avec la souffrance du bébé. Mais heureusement, c’est aussi un roman empli d’amour, celui d’une femme qui a conscience de ne pas agir comme elle devrait, et qui se bat avec l’énergie du désespoir pour éviter la noyade, tant pour elle que pour son enfant. Une maman qui veut rééduquer son cœur à aimer.

Informations pratiques

Un loup quelque part, Amélie Cordonnier – éditions Flammarion, mars 2020 – 270 pages – 19€

Le plus fou des deux, Sophie Bassignac

le plus fou des deux, Sophie Bassignac

Si un inconnu vous abordait et vous demandait : « Donnez-moi une bonne raison, une seule, de ne pas me suicider cette nuit ! » Que feriez-vous ?

Sauver un homme du suicide

Lucie Paugham est une marionnettiste de renom. A quelques heures du réveillon du 31 décembre, Lucie se rend au cinéma pour une corvée : voir le film d’un ami alors qu’elle n’en a aucune envie. Si elle avait su ce qui l’attendait, elle aurait peut-être encore davantage reculé. En effet, un inconnu s’assoit à côté d’elle ans le cinéma et lui tient ces propos sidérants : « Donnez-moi une bonne raison, une seule, de ne pas me suicider cette nuit ! » Non seulement cette phrase ferait frémir n’importe quelle personne, mais chez Lucie, elle a un double retentissement : trente ans plus tôt, dans le salon familial, son père avait fait irruption en demandant à ses filles ce qui pourrait bien l’empêcher de se suicider. Lucie et sa sœur Agnès avaient alors ri, pensant à une blague.

Il ne plaisantait pas.

Tandis que Lucie s’est plongée depuis corps et âme dans sa carrière, restant dans l’ombre de sa marionnette, reprenant le contrôle de sa vie en tirant les ficelles de son double en bois, le passé la rattrape.

Comment réagir ? Venir en aide à cet homme en lui proposant de travailler avec elle ? Ne pas le prendre au sérieux comme elle n’avait pas pris son propre père au sérieux ? Ne surtout pas prendre le risque d’une deuxième mort ?

Un roman sur le déni

Si l’entrée en matière fait redouter un livre sombre, l’angle sous lequel l’auteur aborde ce sujet n’est pas dramatique. Son héroïne a survécu à la disparition de son père et à l’écrasante culpabilité de ne lui être pas venue en aide à temps, en se réfugiant dans le déni. Si sa sœur Agnès et sa mère se sont demandé mille fois pourquoi il est passé à l’acte, Lucie a toujours verrouillé ses pensées. Mais l’irruption de cet homme suicidaire dans sa vie un soir de fête va faire sauter les verrous. Le passé n’est plus derrière elle, il lui fait face. La femme derrière l’artiste va devoir affronter ses démons.

Une lecture agréable, une analyse intéressante, mais il me manquait quelque chose pour être vraiment touchée par ces personnages. Je vous laisse juge avec votre propre lecture.

 

Comme un enchantement, Nathalie Hug

Comme un enchantement, Nathalie Hug

©Karine Fléjo photographie

Un voyage dans la campagne toscane, où les ruines d’une ferme fortifiée servent de décor à une renaissance. Renaissance à la vie. Renaissance à l’amour.

Des racines italiennes

Eddie est une trentenaire solitaire, qui vit dans un petit appartement de la Butte Montmartre, juché sur les toits. Orpheline à l’âge de 16 ans, elle n’a jamais guéri de sa blessure et a préféré mettre l’amour et les gens à distance, ériger des murs invisibles entre elle et les autres, pour ne plus risquer de s’attacher ni de souffrir. Une vie dont elle s’accommode à défaut de s’y épanouir.

Jusqu’à ce qu’un notaire, un certain Monsieur X, lui adresse un courrier l’informant qu’elle est l’unique légataire d’un très vieil homme, Giuseppe Giangrandi, décédé en Italie six années auparavant. Eddie, qui a beaucoup souffert de n’avoir jamais rien su sur ses racines, se dit qu’elle va peut-être pouvoir exhumer des vestiges de son histoire et atténuer ce sentiment d’être amputée d’une partie d’elle-même.

Quand elle débarque dans le village toscan, aux environs de Parme, et découvre la ferme fortifiée de Giuseppe au sommet de la colline, elle tombe immédiatement sous son charme. Un endroit chargé d’histoire, d’amour, celui que Giuseppe et Philomène se vouaient. Et pourtant, ce lieu est un champ de ruines et la tache pour tout rénover énorme. Mais dans ces vieilles pierres, cette nature luxuriante, entourée d’un calme bienfaisant et bercée par cette vue splendide sur les collines, tout semble possible.

Et si ce lieu était le reflet de son être intérieur, un champ de ruines sur lequel il est envisageable de reconstruire, ce qui expliquerait qu’elle s’y sente en harmonie, en profond accord avec elle-même ? Et si en ces lieux sauvages, elle apprenait à apprivoiser le bonheur ?

Reconstruction et renaissance

Nathalie Hug nous offre un roman émouvant, gorgé de soleil toscan, de nature, de collines à perte de vue. L’Italie et ce village de l’Emilie-Romagne sont à ce titre des personnages à part entière du roman. Un roman plein d’images, de couleurs, de parfums, de soleil. Un véritable voyage aux environs de Parme.

Voyage intérieur aussi pour cette jeune femme qui, seule avec elle-même, va avoir le temps de penser et de panser ses plaies, d’identifier ses besoins essentiels, de s’interroger sur le sens à donner à sa vie. Dans cette ferme fortifiée regorgeant d’endroits cachés, de dédales et de mystères, elle va apprivoiser les lieux et apprivoiser son histoire. S’enraciner dans la vie et se déployer, plus forte. Plus vivante que jamais. Et elle va découvrir à cette occasion, que la demeure n’est pas la seule à abriter des mystères

Comme un enchantement est un roman plein d’espoir, qui porte bien son nom.

Informations pratiques

Comme un enchantement, Nathalie Hug – éditions Calmann-Lévy, février 2020 – 387 pages – 19,90€

Livre pour enfant : Mon imagier des 5 sens

Mon imagier des 5 sens, Nathan
©Karine Fléjo photographie

Un nouveau venu pour les tout-petits dans la collection Kididoc : un imagier pour découvrir les 5 sens. Ludique, coloré, animé, il accompagne vos bouts de chou dès six mois.

Bébé : Découvrir ses cinq sens

Je vous ai déjà dit maintes fois ici tout le bien que je pense de cette collection Kididoc, aux éditions Nathan. Pour ceux qui la découvriraient, depuis 10 ans, les documentaires animés Kididoc répondent à toutes les questions que se posent les enfants. Avec des volets à soulever, des tirettes à actionner et d’autres surprises au fil des pages, chaque Kididoc les invite à en découvrir toujours plus sur les sujets qui les intéressent. Éveil, nature, histoire, sciences, vie quotidienne : plus de 30 thèmes disponibles, pour tous les âges !

Ici, le petit, à partir de 6 mois, est invité à découvrir ses sens : identifier ses sons préférés, les diverses odeurs, distinguer ce qui pique de ce qui est doux au toucher, goûter à diverses saveurs (sucrées, acides, salées, amères) ou encore déterminer la couleur de ses animaux familiers. Un livre en petit format, idéal pour les petites menottes des enfants, avec lesquels ils développeront leur sens de l’observation, de la concentration, de même que leur motricité fine (pour actionner les volets, les tirettes).

4 raisons d’acheter ce livre

  • C’est un livre interactif : l’enfant ne reste pas passif devant les pages, il doit observer, actionner des volets, tourner, tirer, soulever, découvrir.
  • Il est en cartonnage très épais donc très résistant aux manipulations pas toujours douces des tout-petits.
  • Ses illustrations sont tendres et colorées et savent capter le regard de l’enfant.
  • Il permet à l’enfant de découvrir le mode qui m’entoure, tout en s’amusant.

Informations pratiques

Mon imagier des 5 sens, collection Kididoc, éditions Nathan – Illustrations Nathalie Choux – 10 pages – 8,40€

Pour enfants à partir de 6 mois

Citation du jour

Les obstacles de la vie n’ont rien de réjouissant et peuvent conduire au découragement. Parfois même, on est incapable de s’en remettre. Pourtant, si vous vous sentez accablé par une situation difficile, j’aimerais vous dire que, si les choses vous paraissent insupportables sur le moment, il n’est pas impossible que plus tard vous en retiriez quelque avantage. Je ne sais pas si cela peut vous consoler mais pensez-y et continuez à aller de l’avant.

Haruki Murakami – Profession romancier (éditions Belfond)

Profession romancier Haruki Murakami