Le bruissement des feuilles, Karen Viggers

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©Karine Fléjo photographie

Karen Viggers, auteure de La mémoire des embruns, nous revient avec un magnifique roman aux éditions Les escales : le bruissement des feuilles. Une ode à la nature, à l’amitié et à la liberté. Un fabuleux voyage au cœur de l’Australie.

Du respect de la nature et des êtres humains

Miki a perdu ses parents dans un terrible incendie. Depuis le drame, elle vit avec son frère Kurt, chrétien fondamentaliste, et tient avec lui un petit restaurant à côté de la forêt, en Tasmanie. Une activité qui leur permet de survivre et d’économiser un peu d’argent en vue de l’achat d’une ferme. Mais à 17 ans, Miki ne connait rien ou presque en dehors du restaurant. Son frère lui interdit non seulement d’en sortir, mais aussi de discuter avec les clients, de lire ce dont elle a envie, de se promener seule. Le monde extérieur est selon lui dangereux pour les femmes, fait de gens immoraux, impies et violents. Une description qui ne correspond pourtant pas à l’image que renvoient à Miki les clients du restaurant. Mais l’emprise de Kurt sur sa soeur est telle, que cette dernière se soumet à ses règles, fussent-elles inhumaines. Sa seule liberté, ce sont ces livres hérités de sa mère dans lesquels elle s’évade le soir. Et de s’identifier aux héroïnes, de vivre par procuration cette vie et cette liberté auxquelles elle aspire tant.

Un jour, pourtant, Miki ose désobéir à son frère : en son absence, ayant trouvé la clef du restaurant dans lequel il la maintient enfermée, elle sort en catimini se promener dans la forêt qu’elle aime tant. Elle y rencontre alors le nouveau garde forestier, Léon.

Léon a lui aussi pris ses libertés par rapport à sa famille. Fils de bûcheron, il s’est refusé à prendre la relève : la forêt est surexploitée et les arbres ont besoin d’être préservés et non abattus. Contre l’avis des siens, il a donc opté pour la profession de garde-forestier. Mais prendre sa place dans cette ville où il ne connait personne, où nombre d’hommes sont bûcherons et vivent de l’exploitation du bois que lui entend protéger, ne sera pas une mince affaire.

Heureusement, dès son arrivée, il se lie d’amitié avec son petit voisin, Max, le fils de Shane. Si Shane est un homme et père agressif, Max est la tendresse personnifiée, un petit garçon attaché aux animaux. Une proie facile pour les durs de l’école. Max devra lui aussi gagner sa liberté, mettre fin au chantage dans lequel le caïd de l’école, Jaden, le maintient.

Ces êtres parviendront-ils à s’affranchir de leurs chaines, à se faire respecter et accepter tels qu’ils sont ?

Déforestation, préservation de la nature : un combat qui concerne chacun

Karen Viggers nous offre cette fois encore une immersion merveilleuse au cœur de la forêt australe, celle des grands eucalyptus, des arbres centenaires qui tutoient le ciel. Elle invite le lecteur à s’interroger sur la déforestation et ses conséquences. Sans aucun dogmatisme, elle ouvre des pistes de réflexion, se met à la place de chaque protagoniste, bûcheron comme défenseur de la forêt. Avec son livre, elle sème une graine dans l’esprit du lecteur, espère que ses réflexions la feront germer et aboutiront une la prise de conscience. Dans ce décor luxuriant, fragilisé par l’homme, elle nous fait assister à l’éclosion des personnages, à leur envol vers une vie meilleure, respectueuse de leur personne et de leurs valeurs. Un envol rendu possible grâce à l’amitié qui les lie. Car Karen Viggers nous le montre ici encore : les métamorphoses les plus belles sont celles qui opèrent dans le terreau de la solidarité et de l’amitié.

 

—> retrouvez ici l’interview de Karen Viggers lors de sa venue à Paris pour Le bruissement des feuilles :

—> retrouvez la chronique que j’avais consacrée à son précédent roman : Le murmure du vent : chronique