Rencontre avec Philippe Besson

« Le roman n’est pas le siège de l’intelligence. Il est le siège de l’émotion »

Philippe Besson
©Karine Fléjo photographie

Ce mardi 22 septembre, les éditions Pocket ont organisé une formidable rencontre avec Philippe Besson, dans un très beau cadre, celui de la délicieuse pâtisserie Bontemps. Une rencontre animée par Christophe Mangelle.

« Arrête avec tes mensonges » a reçu le Prix de la maison de la presse en 2017. Que pensez-vous des prix littéraires ?

J’ai tendance à préférer les prix qui sont donnés par les lecteurs ou les libraires, à ceux qui sont décernés par des vieillards cacochymes. Donc j’étais content de recevoir ce prix-là, qui est un prix populaire.

Philippe Besson Pocket
©Karine Fléjo photographie

« Arrête tes mensonges » est le premier livre d’une trilogie (avec « Un certain Paul Darrigrand » et « Diner à Montréal ») dans laquelle vous parlez de vous, avec le « je ». Vous y évoquez notamment votre homosexualité. Pour quelle raison ?

Je n’avais pas de raison d’être dans la dissimulation. Ces livres racontent aussi ce que la dissimulation crée de frustration, de honte, de culpabilité. En même temps, je ne porte pas un drapeau dans mes livres, car je pense que les livres ne sont pas le siège du militantisme quel qu’il soit. Je me méfie profondément des livres qui entendent délivrer un message. Cela fait des livres lourds, démonstratifs, ostentatoires, lestés par l’intelligence des gens parfois. Le roman n’est pas le siège de l’intelligence mais le siège de l’émotion. On écrit des romans pour que les gens ressentent, pour partager quelque chose de l’ordre du sensible, du sentiment. Donc quand y met de la politique, ça devient un truc lourdingue.

Dans « Un certain Paul Darrigrand », vous évoquez comment vous tombez simultanément amoureux et malade

Oui, j’ai eu une maladie du sang, j’avais un taux très faible de plaquettes ce qui présente un risque hémorragique important. Cela crée l’idée que cela peut s’arrêter du jour au lendemain, que tout est très fragile tout d’un coup. Et surtout, on n’est pas préparé à mourir à 22 ans. Donc cette rencontre avec une mort possible est un exercice curieux.

Mangelle et Besson
©Karine Fléjo photographie

Cette trilogie, c’est votre vie et en même temps, à partir du moment où elle st publiée, elle devient celle des lecteurs

Ces livres-là m’ont valu énormément de courriers de lecteurs et ces courriers étaient frappants car souvent ces gens me disaient que c’était leur histoire, qu’il s’agisse de relations hétérosexuelles ou homosexuelles. Quand on est au plus intime, plus on touche l’universel. Ils se sont reconnus dans ces livres.

Pour ceux qui restent, pense t-on à leurs réactions quand on écrit de l’autofiction ?

Non. Il ne faut pas y penser. Après, moi, je ne fais pas de livre « règlement de comptes ». Mais je pense qu’il ne faut pas y penser sinon on est retenu par le procès que le réel veut nous faire. Si un écrivain commence à s’autocensurer c’est fini. Si vous commencez à être un garçon bien élevé qui fait attention à tout, il ne faut pas écrire des livres.

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